0 CFA

Votre panier est vide.

Violences basées sur le genre : pourquoi le silence des femmes victimes ?

Date :

Plusieurs initiatives ont été prises au sommet de l’Etat pour favoriser l’épanouissement de la femme. Des campagnes de sensibilisation, des lois et surtout, la mise en place du nouveau format de l’Institut national de la femme, INF. Dès lors, les victimes de violences basées sur le genre par exemple, ont la latitude de se plaindre pour non seulement, faire punir leurs bourreaux mais également pour bénéficier d’un accompagnement. En dépit de ces mesures, des femmes victimes de VBG, pour une raison ou pour une autre,   encore se réfugier dans le silence. Un silence destructeur, qui peut parfois être fatal pour certaines et dépressive pour d’autres. Entre le regard pesant de la société, la peur du qu’en dira-t-on en passant par la préservation de leur intimité et la honte, certaines femmes se privent de  parole. Mais jusqu’à quand ?    

Alexia Lumière-Christina ADJOU-MOUMOUNI A. (Coll)

Des regrets aux larmes, une femme violentée se confie

Après de longues investigations, nous avons pu rencontrer une victime de violence conjugale. Au bout de plusieurs heures de négociations, elle a accepté de partager son vécu mais dans l’anonymat. Mariée depuis près d’une dizaine d’années, dame x est régulièrement battue par son époux au moindre geste. Pourtant, les deux amants se connaissaient depuis leur adolescence et s’aimaient d’un amour pur, nous a-t-elle confiée. Pour la jeune femme, rien ne présageait un tel virement de comportement de son conjoint. « Je pensais avoir épousé un homme tendre, calme et doux, son changement radical me laisse toujours perplexe ». Aujourd’hui mère de plusieurs enfants, dont la plupart en bas âge, elle ne vit désormais que pour eux et se dédie uniquement à leur éducation. Le couple qui bat de l’aile, a perdu sa complicité, son harmonie et sa vitalité.  Presque tous les sujets de conversation débouchent sur de violentes disputes, des mots grossiers, des propos injurieux et des coups de poing, même les enfants ne sont pas épargnés. « Parfois les insultes, gifles en plein visage et autres menaces gestuelles se passent devant les enfants et cerise sur le gâteau, c’est la privation de la popote sur des jours ». Madame x, à l’entendre, vit un calvaire conjugal mais par amour pour sa progéniture, se garde de dévoiler ses peines et de quitter sa « prison dorée » car, à plusieurs reprises, son mari aurait menacé de lui arracher la garde des enfants, ayant une grande réputation et « les bras très longs », pour ensuite installer une nouvelle conquête sans hésiter, si elle partait.

Intimidée par son époux, qui n’hésite pas à lui faire du chantage, rejetée par sa propre famille et risée de sa belle-famille, elle se voit délaissée et sans soutien. Pendant son récit douloureux, des larmes ont inondé son visage. « Mes parents s’étaient farouchement opposés à cette union mais j’étais éperdument amoureuse, à cette époque. Rien ni personne ne pouvait me faire entendre raison, je ne voyais pas plus loin que le bout de mon nez. La seule chose qui comptait, c’était mon prince charmant, je me suis donc mariée sans leur accord et leur bénédiction ». Prise au piège, c’est difficile pour elle de faire demi-tour surtout avec des enfants en bas âge et sans situation professionnelle. Des tonnes d’interrogations trottent dans sa tête : « Que dirais-je à mes parents ? A qui laisserais-je mes enfants ? Qui voudrait encore de moi avec ce corps défraichi ? Où vais-je aller sans revenus ? ». N’ayant pas de réponses à ces questions, la jeune mère reste convaincue que le moindre mal, c’est de rester dans son foyer, nonobstant les châtiments corporels qu’elle subit.  Son bonheur à elle se trouve uniquement dans les yeux des petits anges que cette union lui a offerts et elle s’en contente. « La souffrance auprès de mes enfants est plus gérable, je ne supporterai pas de me séparer d’eux, ils sont ma seule famille, ma seule richesse et malgré toute ma désolation, je ne voudrais pas dénoncer mon mari, il demeure le père de mes enfants ». L’une des craintes de Dame X est d’humilier son partenaire et d’abandonner leurs enfants à cause des méchancetés de celui-ci et surtout sa dépendance financière. Cela rappelle et renforce des théories d’observateurs : « Qu’on le veuille ou non, l’autonomisation de la femme, quel que soit son rang social, lui profère une certaine sécurité et liberté, la liberté d’expression, financière et morale. En revanche, la tradition africaine et d’après les enseignements de certaines religions, le mariage, c’est pour le meilleur et pour le pire ». Beaucoup de conjoints se cachent derrière ces préceptes pour maltraiter leurs époux. Autant, des femmes montent au créneau pour dénoncer les faits, autant d’autres se réfugient dans leur coquille.

« La peur est en train de changer de camp », et pourtant !

Lors de récents échanges entre les membres du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), sur l’examen du rapport présenté par le Bénin sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la gent féminine, qui a eu lieu le 21 octobre dernier, plusieurs expertes se sont prononcées.

Au Bénin, malgré tous les efforts consentis par l’Institut National de la Femme (INF), « seulement 35% des femmes ayant subi des violences physiques ou sexuelles ont déclaré avoir besoin d’aide », déclare une experte. A priori, selon l’avis des expertes, la précarité et le faible niveau d’instruction des femmes, dressent le lit aux pratiques néfastes, telles que les violences basées sur le genre. C’est ce qui explique selon elles, la persistance des inégalités. En cause, une faible connaissance et application des textes. Elles estiment que : « les femmes et les filles du Bénin ne peuvent pas bénéficier pleinement de la protection du cadre juridique et politique adopté en matière d’égalité des sexes et de lutte contre la violence basée sur le genre ». Tout simplement parce que, « les stéréotypes culturels et patriarcaux persistants constituent un obstacle majeur continuant à jouer un rôle considérable dans la société et dans les communautés ». Conséquence, elles sont réduites au silence, en raison de ces stéréotypes patriarcaux. C’est ce qui explique le fait que la plupart d’entre elles ne signalent pas les violences dont elles sont victimes ou sont à nouveau victimisées au cours de la procédure », expliquent les expertes.

Néanmoins, à les en croire, «la peur est en train de changer de camp ».  La parole des victimes et des proches des victimes se libère progressivement, comme le témoigne le nombre de plus en plus croissant de requêtes reçues par l’Institut National de la Femme (INF).

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Partager

spot_img

Populaires

dans la même catégorie
Articles

Trafic de produits illicites : des amandes de 200.000f introduites

Le Burkina Faso intensifie sa lutte contre le tabagisme....

Tournoi des Médias : Quatre équipes en lice pour le challenge

Dans le cadre de la Journée internationale de la...

Pour trafic de produits illicites : 18 suspects interpellés à Parakou

Du cannabis et du tramadol saisis en quantité importante...

Bénin : 222 kg de faux médicaments saisis

La Police républicaine a démantelé un réseau de vente...