Lundi 25 novembre 2024. Le marché moderne de Midombo est ouvert au public. Grande espérance pour les vendeurs et vendeuses installés dans un hall carrelé, compartimenté en places à octroyer à chacun en vue de son commerce. Samedi 12 avril, soit un peu moins de cinq mois après cet espoir suscité, les fruits n’ont toujours pas encore tenu la promesse des fleurs.

Vadim QUIRIN
Cotonou, Akpakpa, au 3ème arrondissement. Le long des caniveaux à ciel ouvert sécurisés par des barres de fer. Un édifice impressionnant dressé en forme de trois bâtonnets posés au sol dont le principal (bloc A) est disposé en horizontal et les deux autres (blocs B et C), se faisant face, en vertical et perpendiculaires au principal. Ils sont séparés par des couloirs d’aération et de circulation pavés, pouvant laisser passer un véhicule à quatre roues. La pancarte de fortune posée au moment de la construction indique que l’infrastructure est le « marché Midombo » qui représente le site 5 du lot 1 des neufs premiers marchés modernes érigés à Cotonou dont l’ensemble s’évalue à un coût global de 32 milliards de FCFA. Quand on y entre, des étalages achalandés courtisent la clientèle. Les yeux admirent comment les tomates, piments, oignons sont disposés. Par endroit, ce sont les maïs, riz, haricots blancs et rouges qui sont exposés. Le cosmétique, les pagnes et habits, les ustensiles de cuisine en aluminium et en plastique ne sont pas en reste. Le maïs transformé en farine épaisse pouvant être modelée et être vendue sous forme de boules pour donner de la bouillie ou de l’akassa à la cuisson s’impose également dans ce marché. La boucherie attire aussi. Entreposées sur des étagères carrelées, les viandes de bœufs et de moutons sont proposées au kilo aux acheteurs. Des larmes de vitres en forme rectangulaire protègent la viande des mains indélicates des clients tentés de la toucher avant de se décider à l’acheter ou non. Ailleurs, les packs d’eau et de boissons sont posés les uns sur les autres. Il en est de même des canaris et des feuilles, écorces et racines d’arbre qui nourrissent la pharmacopée.
La chute des recettes antérieures à Midombo
« C’est vraiment magnifique », affirme un monsieur en tenue locale qui y était pour quelques emplettes. « Constatez vous-mêmes la propreté, l’aisance avec laquelle on peut circuler d’une rangée à une autre », commente-t-il. Même appréciation chez une femme pressée d’aller retrouver son nourrisson à la maison : « non, les marchandises ne sont pas chères. Elles sont vendues au même prix que dans les autres marchés ». En effet, la mesure de maïs est à 250 FCFA, informe une vendeuse de céréale qui profite pour décrire son quotidien : « les clients se font désirer. Avant, en moins de trois à cinq jours, j’arrive à écouler un sac de 100 kilos. Présentement, cela fait exactement sept jours que j’ai ouvert un sac et il y a toujours un stock non liquidé ». Cette mévente est peut-être due au fait que « nous sommes au début », tente d’expliquer Valérie, vendeuse de biscuits. Pour l’instant, « les ventes sont aux ralentis », atteste-t-elle tout en spécifiant qu’elle préfère être dans le marché que de rester couchée à la maison. « Cela fera bientôt cinq mois que nous sommes dans le marché mais j’ai l’impression que tout le monde ne sait pas encore que nous y sommes déjà installées », renchérit maman Colette, vendeuse de poissons fumés. « Avant, par jour, mes recettes oscillaient entre 30 et 40 mille francs CFA. Aujourd’hui, difficilement je suis à 25 000 FCFA par jour », mentionne-t-elle. Louis, le boucher, compte moins de deux mois dans le marché. Il confirme cette chute des recettes antérieures. « Au niveau du Sacré-cœur, le chiffre d’affaires était de 50 000 FCFA par jour. Actuellement, je totalise difficilement 20 000 FCFA par jour », renseigne-t-il.
L’ombrage de Dantokpa et le plaidoyer
La très faible affluence constatée le samedi 12 avril, de 15 heures 30 minutes à 18 heures 30 minutes corrobore ses déclarations. Les allées et venues des hommes et des femmes, des jeunes et des adolescents se comptent au bout des doigts. Le fait que le marché Midombo soit à moins de 10 minutes à moto du marché international Dantokpa peut expliquer cette faible affluence. Alexis, sous-patron dans un atelier de coiffure installé non loin du marché préfère se rendre à Dantokpa pour se ravitailler. « C’est rentable pour nous d’aller acheter auprès des grossistes et demi-grossistes que les détaillants qui sont dans les marchés secondaires », avoue-t-il. Midombo est aussi moins animé parce que partiellement occupé. Les places des blocs B et C ne sont pas encore attribuées. Seules quelques places au rez-de-chaussée du bloc A sont octroyées. Les places du haut ne sont même pas encore attribuées et l’accès est bloqué au public. Maman Dona, vendeuse de divers dans la zone, attend la suite du dossier qu’elle a introduit. « Ils nous ont dit qu’ils vont d’abord installer les anciennes et se pencher après sur le cas des nouvelles. Nous sommes dans l’attente », affirme-t-elle. En outre, les horaires sont à revoir, insiste maman Colette, la vendeuse de poissons fumés. « Avant, le marché était comme un second domicile pour nous. Nous y restions jusqu’à une heure du matin. On y faisait la cuisine et les clients avaient le temps de nous rejoindre pour acheter. De nos jours, tout ceci est impossible. Nous sommes là de 8 heures à 21 heures. Nous avons observé qu’à l’heure de la fermeture, certains acheteurs pressent les pas mais restent bloqués à la porte. Pour ce faire, à défaut d’aller à zéro heure, nous pensons que nos marchés peuvent fermer leurs portes à 23 heures », plaide-t-elle.

L’équipe à la tâche
Un appel qui ne tombera sûrement pas dans les oreilles de sourd. Car, au niveau de chaque marché, notamment à Midombo, se trouve un gestionnaire qui attend une instruction ferme de la hiérarchie avant de s’ouvrir à la presse. Il est côtoyé par une équipe d’agents de sécurité positionnés au niveau des entrées et d’autres faisant la ronde. Des prestataires en tee-shirt jaune apparaissent par moment pour des nettoyages spontanés. Une équipe de garde-vélos est également visible dans les rayons et n’attend qu’une meilleure affluence au marché moderne de Midombo pour faire de bonnes affaires.
Midombo pour accueillir le flux de Dantokpa
Il n’est pas exclu que le marché de Midombo, partiellement occupé, soit destiné à accueillir une bonne partie du flux des vendeuses de divers de Dantokpa. La preuve, contrairement aux autres marchés modernes de Cotonou ouverts, où il y a plus de vie, celui de Midombo, après 5 mois de fonctionnement, est à moins du tiers de son espace exploité. Même le bloc A qui est mis en service est à moins de la moitié de sa capacité. Lui seul compte 373 compartiments pour les ventes au niveau du hall en bas comme en haut. Il y a 28 boucheries, 11 poissonneries et 04 espaces écailleurs. Certains de ces emplacements sont encore vierges. Il est de même des 34 boutiques et 16 restaurants qui attendent leurs premiers occupants. Le Bloc B qui présente la même architecture que le bloc A est carrément vide. Tout juste une boutique de vente d’eaux minérales est ouverte à l’extrémité droite du bâtiment, vue de face. A part cette exception, les 252 compartiments marchands au niveau des halls du haut et du bas, les 04 restaurants et les 40 boutiques restantes ont encore leurs portes closes. Le bloc C construit pour accueillir les articles des forgerons installés actuellement dans les encablures du siège de l’arrondissement est également gardé fermé. Ici, l’architecture est différente. Sa forme rappelle un mini stade construit où les tribunes sont couvertes et le milieu est laissé à ciel ouvert pour faire passer les rayons solaires et les gouttelettes de pluie. Ce bloc comporte 125 places pour accueillir les articles des forgerons et 23 boutiques disposées tout autour. Avec la délocalisation définitive de Dantokpa, il est certain que l’animation du marché de Midombo sera à la hauteur des attentes.
V.Q.