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Eunice LOISEL KINIFFO, Directrice générale de l’ANaGeM : « Aucune redevance n’est encore collectée dans les marchés »

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Issue du secteur privé, forte de plus de deux décennies d’expérience dans une institution bancaire, Eunice LOISEL épouse KINIFFO a fait le choix, depuis août 2023, de se mettre au service de son pays. A la tête de l’Agence Nationale de Gestion des Marchés (ANaGeM), elle œuvre avec ses collaborateurs à assainir l’environnement des marchés et à professionnaliser le secteur commercial longtemps resté sans véritable encadrement. Avec la construction des marchés modernes par le Gouvernement du Président Patrice TALON, ce domaine connaît un nouveau souffle. C’est avec spontanéité qu’elle a accepté de répondre aux préoccupations de votre journal.

Que peut-on retenir des missions de l’ANaGeM ?

L’ANaGeM a pour missions principales d’assurer la gestion, l’exploitation et la maintenance des marchés modernes urbains et régionaux construits par l’État Béninois. Notre Agence veille au fonctionnement optimal et à la transparence dans nos interactions avec les marchands, l’entretien des lieux, la sécurité des sites marchands ainsi qu’à une occupation équitable des espaces disponibles. L’ANaGeM assure également le dialogue avec les usagers et la supervision des prestataires intervenant sur les différents sites.

Dans tout ceci, quel rôle est assigné aux communes qui abritent ces marchés ?

Nous entretenons une excellente collaboration avec les communes. Le cadre de gouvernance de l’ANaGeM est bien défini : les marchés sont implantés sur des territoires communaux, toutes nos actions dans les onze (11) communes concernées se font en concertation étroite avec les mairies.

Concernant la collecte des redevances, à ce jour, aucun marchand ne s’en acquitte encore. Il convient de préciser que le premier marché, celui de Cadjèhoun, a été inauguré le 15 juin 2024. Le Gouvernement, seul habilité à fixer les montants des redevances à percevoir auprès des marchands ne s’est pas encore prononcé sur la question.

Toutefois, une distinction s’impose entre les marchands installés sur les étals et ceux occupant les boutiques. Seuls ces derniers s’acquittent actuellement de leurs loyers. En l’absence de collecte sur les étals, aucune rétrocession aux communes ne peut, pour l’instant, être envisagée.

Apparemment, le gouvernement fait du social à ce niveau…

Effectivement, l’action du Gouvernement s’inscrit dans une démarche hautement sociale. Le fait que la majorité des marchands ne s’acquitte encore d’aucune redevance en est une illustration manifeste.

Pour en revenir aux communes, en attendant que le gouvernement ne statue, est-ce que le principe de leur rétrocéder une partie des redevances est acquis ?

Au sein de l’Agence, nous avons formulé des propositions à l’endroit du Gouvernement. Il revient à la Haute Autorité de prendre la décision finale.

A ce jour, quel est le nombre total de marchés fonctionnels dans le portefeuille de l’ANaGeM ?

Au 31 décembre 2024, l’ANaGeM a ouvert quatorze (14) marchés aussi bien en zone urbaine qu’en région, dont huit (8) à Cotonou.

D’autres chantiers sont en cours ?

Bien évidemment, nous avons des marchés en cours de finition. Pour l’année 2025, nous prévoyons l’ouverture de sept (07) nouveaux marchés. Il s’agit principalement du marché de Cococodji à Abomey-Calavi, des marchés de PK3 et Hlazounto à Cotonou, du marché de Ouando à Porto-Novo, ainsi que du marché de Houndjro à Abomey, et enfin des marchés de Parakou et Djougou dans la zone nord.

Tous ces marchés sont déjà construits, seuls quelques ajustements techniques restent à finaliser. Dans certaines zones, ce ne sont pas les infrastructures elles-mêmes, mais les travaux de voirie qui sont en cours.

S’agissant des marchés à vocation nationale, deux pôles stratégiques sont à mentionner : le Pôle Agroalimentaire du Grand Nokoué, situé à Abomey-Calavi (souvent désigné comme le marché de gros) destiné à accueillir une partie des marchands de gros de Dantokpa puis le Pôle Commercial Général Mathieu Kérékou, situé au stade de l’amitié, qui accueillera également une fraction des marchands de Dantokpa.

Le démantèlement annoncé du marché Dantokpa ne rencontre-t-il pas de résistances majeures ?

Le marché de Dantokpa s’est développé progressivement au fil des décennies. Il compte aujourd’hui environ trente-trois mille marchands. A ce jour, aucun site ne dispose de la capacité nécessaire pour accueillir simultanément un aussi grand nombre de vendeurs. C’est sur cette base que le Gouvernement a opté pour une répartition sectorielle des activités.

Dans un pays envisageant une organisation commerciale structurée, la cohabitation entre marchands de gros, semi-grossistes et de détail n’est pas recommandée. C’est dans cette dynamique que le Gouvernement du Président Patrice TALON a initié la construction du marché de gros d’Abomey-Calavi, destiné à accueillir exclusivement les commerçants de gros de Dantokpa menant des activités de produits agroalimentaires.

Quant au Pôle Commercial Général Mathieu Kérékou, il est conçu pour accueillir des marchands de Dantokpa exerçant des activités de produits nobles : vente de pagnes, de bijoux, de produits cosmétiques et de maroquinerie. L’ANaGeM œuvre également à y intégrer progressivement d’autres secteurs d’activités de Dantokpa, initialement non prévus.

Indépendamment des commerçants de gros et de produits nobles, le marché de Dantokpa abrite également de nombreux marchands de détail. Or, les marchés modernes actuellement ouverts à Cotonou disposent encore d’une capacité d’accueil importante. Le Gouvernement, en prévision de la réorganisation du commerce de détail, a volontairement conçu ces marchés avec une grande capacité pour absorber une partie significative des marchands de détail de Dantokpa.

L’objectif aujourd’hui n’est plus de concentrer toutes les activités sur un même site mais de les répartir de manière sectorielle et fonctionnelle. A titre illustratif, à Cotonou, le marché de Tokplégbé compte environ une cinquantaine de bouchers, en raison de sa proximité avec l’abattoir. De même, le marché de Ganhi regorge d’environ une soixantaine de bouchers. En revanche, Menontin  n’en compte que quatre, tandis que Cadjèhoun n’en compte que deux.

Cette sectorisation vise à permettre aux usagers de retrouver en un seul lieu l’essentiel des produits nécessaires pour la cuisine. Par exemple, il n’y a pas de poissonniers à Tokplégbé, tandis que le marché de Menontin en regorge plus d’une centaine.

Nous travaillons actuellement, en collaboration avec la SOGEMA  pour la mise à jour de la liste des marchands de détail de Dantokpa. Une fois la liste exhaustive établie, ces marchands de détail seront orientés vers les marchés de détail de leur choix, selon les capacités disponibles. Des propositions d’installation leur seront faites, dans la logique de sectorisation, afin d’assurer une meilleure lisibilité de l’offre commerciale pour les clients et leur garantir une expérience d’achat complète et satisfaisante.

Les commerçantes de Dantokpa sont-elles disposées à se rendre sur ces sites-là ?

Nous sommes dans un État. En tant que citoyen, l’objectif n’est pas de résister aux initiatives mises en place pour notre épanouissement. En ce qui concerne Dantokpa, la configuration actuelle est très préoccupante : des tôles jonchent l’environnement, l’insalubrité règne, et les fils électriques sont installés de manière anarchique. Lorsqu’on met à disposition un environnement plus moderne, offrant une protection contre les intempéries, le soleil et la pluie, l’objectif n’est pas de faire de la fronde au système, ni à la décision du Gouvernement. L’État a décidé d’offrir aux marchands et aux usagersla modernité que l’on trouve dans les pays développés. C’est sur cette base que ces infrastructures modernes, qui répondent aux standards internationaux, ont été érigées. Si quelqu’un souhaite s’opposer par principe, il a le choix de rester chez lui pour exercer son activité commerciale ou de rejoindre le nouveau site.

Au niveau de l’ANaGeM, nous n’avons pas été confronté à de la résistance de la part de nos acteurs de Dantokpa. Nous sommes encore dans une phase de sensibilisation, car il s’agit d’une nouvelle donne. Cependant, lorsque les gens réalisent les bienfaits et comprennent les enjeux, ils finissent par s’aligner.

Avec le soutien de notre ministère de tutelle, celui du commerce et de l’industrie en l’occurrence, nous avons organisé des visites sur le marché de gros d’Abomey-Calavi pour les marchands de Dantokpa. Je me souviens encore de l’impatience des commerçantes, prêtes à déménager. Cela a été très encourageant. Le site offre six (06) entrepôts secs d’un hectare chacun, ainsi que deux (02) entrepôts frigorifiques de 250m2 chacun. Dans ce nouvel environnement sain, les marchands seront à leur aise,dans un cadre sain, entretenu et électrifié.

Pour en revenir aux marchés de détail, quelles sont les relations que les vendeuses entretiennent avec les représentants de l’ANaGeM sur place ?

A l’ANaGeM, nous avons instauré un mode de fonctionnement rigoureux. Nous avons recruté des jeunes dynamiques, qui agissent comme nos yeux et nos oreilles sur les différents sites. Ce sont eux les responsables des marchés. Ils ouvrent les marchés à 8h du matin, notamment en zone urbaine, et les ferment à 21h le soir. Ces responsables sont présents sur les marchés toute la journée et assurent l’interaction entre les marchands et l’Agence.

Ces responsables de marchés entretiennent de bons rapports avec les marchands. Nous sommes face à une cible particulièrement sensible, qui a longtemps évolué dans un environnement où les pratiques étaient informelles et peu encadrées. Mais aujourd’hui, nous évoluons dans un cadre où des règles strictes sont mises en place. Il n’est plus possible pour quiconque de s’installer où bon lui semble dans le marché, de verser de l’eau dans les allées ou d’entreposer des marchandises à des endroits non autorisés. Les responsables veillent à la bonne application du règlement intérieur, connu de tous les marchands.

Avez-vous une idée du taux de fréquentation des marchés ?

Nous n’avons pas encore d’indicateurs précis pour mesurer la fréquentation de nos marchés. Cependant, il convient de souligner que les nouveaux marchés ont été construits sur les anciens sites, ce qui implique que la fréquentation reste similaire. De plus, nous veillons à ce que les usagers trouvent tout ce dont ils ont besoin dans ces marchés. Grâce à des sites propres et sécurisés, les usagers s’y rendent avec enthousiasme et fierté. A ce jour, nous n’avons enregistré aucune plainte majeure relative à la mévente.

Propos recueillis par Moïse DOSSOUMOU

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