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Edwige Gbessinon, mère célibataire à Zinvié: Portrait d’une femme résiliente

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(Une quête de 1000FCFA par jour pour s’occuper de quatre enfants)

Tout faire pour rentrer en fin de journée avec deux billets de 500FCFA afin de subvenir aux besoins d’un garçon de moins de 3ans, de sa grande sœur qui a 8 ans et de ses grands frères âgés de 14 ans et 6 ans. Tel est le poids que charge seule, chaque jour, Edwige Gbessinon, mère de ces derniers, résidente à Zinvié et, pour qui, le 08 mars ne change rien à son quotidien.

Vadim QUIRIN (Coll)

Un véritable challenge journalier pour Edwige Gbessinon, 42 ans environ, mère-célibataire de six enfants dont quatre (une fille et trois garçons) qu’elle doit nourrir, soigner, vêtir, loger et instruire sans l’appui d’un homme. Une course quotidienne contre la montre, à laquelle elle est soumise, de 8h à 21h au moins, pour espérer obtenir un bénéfice de 1000FCFA, après avoir vendu au marché de Zinvié, localité située à 38 km de Cotonou, 80 sachets de yaourt, attachés 50FCFA l’un. En principe, les jours de marché, cela ne pose pas de problème, atténue maman Tundé, 26 ans, mère d’une fille et de deux garçons, native de la localité, ancienne vendeuse de ces yaourts et actuellement vendeuse de la boisson locale akpan, en face de l’école primaire publique de Zinvié. En effet, « tous les cinq jours, elles peuvent vendre pour 10000FCFA voire 15000FCFA ou 20000FCFA », clarifie-t-elle. Toutefois, nuance cette ancienne vendeuse du yaourt attaché au marché de Zinvié, « généralement, les jours ordinaires, la recette journalière ne dépasse pas 5000FCFA ». De son côté, précise Edwige Gbessinon, « mes recettes journalières avoisinent à peine 3 000FCFA car, nous sommes maintenant nombreuses à circuler dans le marché pour vendre le yaourt ».

Autre poids qui pèse sur l’épaule de dame Edwige Gbessinon, renseigne maman Merveille, 40 ans, mère d’une fille et de deux garçons, vendeuse de pain sucré au niveau du marché, « est le fait qu’elle doit laisser, à l’un de ses colocataires, son garçon de moins de trois ans pour s’occuper de la vente de son yaourt ». Le comble, poursuit-elle, « ce n’est qu’après 22h qu’elle rentre pour enfin être au chevet de ses quatre enfants ». Le plus grand, « le garçon a 14 ans et est au CE2 ; la fille, qui suit, a 8 ans et est au CI puis le garçon, qui vient avant le dernier, a 6 ans et est au CI », informe leur mère. « Depuis trois ans où ils sont à ma charge et que j’ai quitté la commune de Tori-Bossito pour Zinvié, je vendais de la nourriture pour subvenir à leurs besoins. Mais faute de soutien et vu ma charge, je n’ai pas pu réinvestir », confesse Edwige Gbessinon, dont le nom est tatoué sur son bras gauche. « Disons plutôt qu’elle a été fragilisée par la dernière grossesse où, seule, elle a fait face aux dépenses », révèle maman Merveille, l’une de ses cohabitantes qui l’appelle affectueusement « Nafi ».

Une vie joviale brisée

Les pères des enfants ne l’ont pas assistée. D’abord, celui du dernier n’a plus été revu depuis l’évolution de la grossesse. Et ensuite, le père des trois premiers enfants n’avait plus donné signe de vie depuis 5 ans jusqu’à sa disparition, il y a environ 12 mois. « Je ne les ai plus revus », déplore -t-elle avant d’ajouter : « c’est ma grande sœur Philomène, résidente ici à Zinvié, qui, par moment, donne à manger aux enfants et auprès de qui je les laisse si je dois par exemple me rendre au marché de Glo-Djigbé pour vendre le yaourt ». Ces enfants subissent ce sort parce que « j’ai décidé de sauver ma vie quand j’étais avec mon premier homme. On ne cessait de se bagarrer et cela prenait de plus en plus d’ampleur », rappelle-t-elle le visage fermé.

Pourtant, Edwige Gbessinon, originaire de Comè, « est une femme qui adore l’ambiance et est une humouriste », se plait à vanter maman Tundé. « Quand elle est au milieu de vous, vous êtes sûres que vous allez rire », complète-t-elle. Cette vie de gaîté transparait bien dans son allure élégante où, bien qu’étant vendeuse ambulante de yaourt, elle apparait avec une robe bleue, de type prêt-à-porter d’au moins 7000FCFA, brodée de garniture à l’avant et autour des manches. Une tenue qui dessine toute sa corpulence d’environ 80 kg, avec une taille d’au moins 1,65 m et un tour de hanche décoré de perles. Une beauté qu’elle extériorise en appliquant un vernis au double-ton (gris-clair et rose) sur les ongles des pieds. Sa peau, gardant les vestiges des pommades éclaircissant antérieurement appliquées, renseigne que dame Edwige Gbessinon a toujours cherché à soigner son image et a peut-être été, par moment, mal orientée. Une faiblesse dont a profité le genre masculin pour en abuser. Car, elle était encore apprentie coiffeuse quand elle a été enceintée et n’a pas pu terminer sa formation. « Mon diplôme de fin de formation de coiffure est aujourd’hui ma progéniture », avoue-t-elle, le cœur serré.

Descendre sur le terrain pour contextualiser le thème JIF de l’année

Somme toute, elle ne perd pas espoir en un lendemain meilleur : « Mon plus grand vœu est d’avoir un soutien pour mes enfants afin de reprendre ma vente de nourriture ». Malheureusement, elle ignore le chemin conduisant au Guichet unique de protection sociale (GUPS). Elle ne croit pas aux microfinances et veut éviter les dettes, surtout dans un contexte où elle doit deux arriérées de loyer de 6 000FCFA qu’il faut payer par mois. Un autre couac, elle ne dispose pas d’acte de naissance, elle n’a pas accompli les formalités du Recensement administratif à vocation d’identification de la population (RAVIP).  Elle est donc sans pièce d’état civil. « Ma maman m’a dit que nous avons perdu nos pièces dans un incendie », lance-t-elle.

En ce mois consacré à la femme, Edwige Gbessinon attend, malgré ses insuffisances, que les autorités et leurs collaborateurs quittent les bureaux, sillonnent les marchés et les points stratégiques du monde rural. Qu’ils y déploient les services pour contextualiser dans leur vie le thème de l’année 2025 de la célébration de la Journée internationale des droits des femmes : « Pour toutes les femmes et les filles : droits, égalité et autonomisation ». Car, le monde ne peut plus attendre 30 nouvelles années pour voir s’épanouir toutes les filles et femmes, interpelle l’Organisation des nations unies (ONU).

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