Face aux diverses critiques sur le coût des chantiers réalisés et ceux en cours, notamment la construction de l’Assemblée nationale, le ministre conseiller aux Infrastructures, à la Gouvernance locale et au Cadre de Vie Jacques Ayadji, aussi président du parti Moele-Bénin, clarifie, dénonce et pointe du doigt des incohérences autrefois mises en œuvre et soutenues par les bâtisseurs présumés du moment. Outre la question des infrastructures, le ministre conseiller se prononce sur les exigences du Code électoral et sur l’affaire UPR-PRD.

Michèl GUEDENON
Lors de l’interview qu’il a accordée, lundi 16 juin 2025, à Guérite TV Monde, le ministre conseiller aux Infrastructures, Jacques Ayadji a apporté des clarifications sur les coûts de réalisation de plusieurs chantiers qui, depuis peu, intéressent l’opposition, principalement le parti Les Démocrates. Sur le nouveau siège de l’Assemblée nationale, le ministre conseiller réfute toute idée de surfacturation. Il rappelle qu’au moment de la démolition de l’ancien bâtiment, seuls 22 milliards avaient été investis dans une structure non achevée, à laquelle il fallait ajouter 45 milliards pour en terminer la réalisation. « Ce qui faisait 67 milliards à l’époque. Aujourd’hui, on en est à 59 milliards, sans avoir encore engagé les marchés pour l’équipement, la sonorisation et autres détails. Où est donc le scandale ? », s’interroge-t-il. Concernant les critiques sur le coût de réalisation de la route Sèmè-Porto-Novo, que l’opposition a estimé à 89 milliards, une lecture que Jacques Ayadji qualifie de malhonnête, le ministre a avancé des chiffres. Selon lui, il s’agit d’un linéaire total de 20 km, en tenant compte des voies bidirectionnelles, auquel s’ajoutent deux ponts d’une valeur globale de 54 milliards. « Des 157 milliards prévus pour ce projet, il en reste 103 quand on effectue le calcul. Il suffit de diviser ce montant par 20 pour avoir le montant par kilomètre », recommande-t-il. Le boulevard de la Marina, qui a coûté 35 milliards pour 5,8 kilomètres d’après l’opposition, a également été évoqué. Ayadji rectifie le chiffre : « C’est 37 milliards pour une longueur développée supérieure à ce qui est annoncé. Et ce n’est pas un simple bitumage, c’est une infrastructure structurante ».
Toujours sur la question des infrastructures routières, le ministre conseiller a démenti l’affirmation de Guy Mitokpè, secrétaire à la communication du parti Les Démocrates, selon laquelle une autoroute aurait coûté 6 milliards de francs au Bénin. « Je voudrais lui dire qu’il n’y a, à cette date, aucune autoroute au Bénin », a-t-il précisé, jugeant incohérente la comparaison faite avec le prix des autoroutes en France et dans des pays africains.
Les Démocrates appelés à se remémorer les incohérences d’hier
Jacques Ayadji, dans ses explications, a mis le principal parti de l’opposition, Les Démocrates, dont le président a gouverné le Bénin avant le régime dit de la rupture, face à son passé. Le ministre se désole de ce que les membres de ce parti estiment que peu importe la zone, le montant du kilomètre doit être le même, quelles que soient la qualité et la nature de la route. « En 2012-2013, le Président de la République était le Dr Yayi Boni. En cette période, on a construit 18,5 kilomètres de route à 34 milliards de francs CFA à Ouidah. Dans le même temps, on a fait la route Ouidah-Tori-Pahou et le contournement de Tori qui font 37km à 12 milliards de francs CFA. Qui nous explique cela ? Comment ceux qui disent que le coût par kilomètre devrait être le même ont-ils pu réaliser cela ? », questionne-t-il.
En outre, sur l’accusation d’opacité dans la gouvernance actuelle, Ayadji inverse la charge : « Que ce parti soit plus raisonnable. Finalement on n’arrive plus à les suivre. Quand vous êtes un parti politique responsable et que vous commencez un débat, il faut surtout chercher à le finir avant d’en chercher d’autres ». Il regrette le manque de rigueur dans les argumentaires du principal parti de l’opposition, citant des affirmations qui, selon lui, ne tiennent pas face à l’évidence des chiffres. « Quand je réponds, ils ne reviennent plus avec des contre-preuves », tranche-t-il, soulignant qu’aucune discussion n’a jamais suivi les rectifications faite jusque-là suite aux accusations. Selon lui, c’est une démarche de saut de coq à l’âne, sans aucune rigueur.
Les ministres conseillers pour servir de répondant au gouvernement ?
Si d’aucuns avancent le « ministre conseiller » est pensé pour répondre à un besoin de répliquer ou d’injurier, le ministre conseiller, lui, a expliqué ce qu’il en est réellement. Ainsi, pour ce qui est du poste de ministre conseiller, souvent présenté comme un instrument de contre-attaque gouvernementale, Jacques Ayadji rétorque : « Mon rôle n’est pas d’insulter ou de polémiquer. Je suis là pour servir le pays, pour faire remonter les préoccupations et douleurs du peuple au gouvernement ». Pour lui, il s’agit plutôt d’un poste qui exige de chaque ministre une implication active et une contribution collective à l’atteinte des objectifs fixés, tout en étant proche du peuple. Cela s’explique, à ses dires, par la présence incontestée des ministres conseillers sur le terrain.
Parallèlement, il a parlé des partis de la mouvance qui tentent de faire recours à des procédés de déstabilisation dans le cadre de leurs campagnes. Une chose qui, selon lui, n’est pas en harmonie avec la vision du chef de l’État qui a toujours voulu que les actions des partis de la mouvance continuent plutôt à la renforcer au lieu de la déstabiliser. Il a, à ce niveau, exhorté ses pairs à un engagement responsable, peu importe les finalités.
Dissouts mais éligibles?
L’affaire UPR–PRD, qui défraie la chronique depuis un moment, n’a pas échappé au regard critique de Jacques Ayadji quoique décidé à ne pas manquer de respect dans la manière de s’y prendre. En effet, il a évoqué une situation morale et éthique : « On ne peut parler de fusion de deux partis sans qu’aucun congrès de dissolution n’ait été tenu. L’UPR a été aux élections, donc il n’y a pas eu de fusion réelle. Les textes sont clairs », a-t-il déclaré, tout en émettant que c’est comme si le Prd était en train de faire un aveu public d’avoir contourné la loi.
Tout au long de ses explications, Jacques Ayadji a insisté sur la nécessité pour tous les partis, qu’ils soient de l’opposition ou de la mouvance, d’être raisonnables dans les argumentaires. Il a fini son interview en se déclarant prêt à affronter, dans un débat constructif, n’importe quel membre du parti de l’opposition sur les questions d’infrastructures. Il a ainsi levé ses récentes exigences à travers lesquelles il ne voulait qu’un spécialiste dans le domaine des infrastructures.