Le directeur de l’Ecole d’initiation théologique et pastorale (EITP) Rodrigue Gbédjinou s’est prononcé sur le décès du Pape François. Dans cet entretien, il a passé au peigne fin la vie du Souverain Pontife avant sa Pâques avec le Père.

Le décès du Pape François plonge la communauté catholique du monde entier dans le deuil. Quelle est votre lecture du départ du Souverain Pontife qui coïncide avec la célébration pascale ?
Le Pape est mort, vive le Christ et son Eglise ! Et si le mois d’avril était celui des Papes ? Le 2 avril 2005, naissait au ciel le Pape Jean Paul II. Le 19 avril 2005, le Cardinal Joseph Ratzinger devient Benoît XVI, comme son successeur. Le 27 avril 2015, la canonisation exceptionnelle de Saint Jean Paul II et de Saint Jean XXIII à la place Saint Pierre. Aujourd’hui 21 avril 2025, naissance au ciel du Pape François. Il s’en est allé comme un pèlerin de l’Espérance. Ne pouvant pas parler, il a souhaité Joyeuses Pâques à nous tous. Il savait qu’il allait célébrer sa Pâques avec le Seigneur. Il est donc apparu ce jour de Pâques malgré l’épreuve de la maladie et de l’âge, combattant jusqu’au bout. Au lundi matin, il a donc fait sa Pâques. On voit là que la vie et la mort s’affrontent et se côtoient. Que les anges l’emportent vers le Père.
Que pouvez-vous dire de ses douze ans passés à la tête de l’Eglise ?
Le premier point que nous retenons de lui, ce n’est pas une théologie systématique mais des fragments théologiques ou des pièces théologiques axés sur le contexte, la réalité et le social. Le deuxième point, c’est le discernement pastoral et théologique avec l’accent sur le ministère de l’Evêque comme celui du discernement. Et le troisième point, c’est son rêve de réformateur.
Avez-vous par hasard des souvenirs particuliers de lui ?
Il n’y a pas eu de grandes nominations d’Africains. Il a réveillé l’épiscopat africain qui s’est subitement rendormi aussi, peut-être. Mais il y a eu un effet d’éveil spontané. Je crois que cela a surpris tout le monde, la réaction spontanée de l’épiscopat africain, et qui devait créer un leadership africain. Ce que moi j’appelle un patriarcat de pensée. Mais nous sommes tellement dans la question de survie que nous n’accélérons pas encore les grandes réflexions perspectives. Et donc, il y a eu ce réveil. Vous voyez, il y a eu un document qui a été sorti et l’épiscopat béninois a dit non, pas cela ici. On peut laver les pieds des femmes le Jeudi saint. Et nous avons trouvé une raison culturelle en disant que laver les pieds aux femmes chez nous, c’est comme si elles sont adultères. Nos réponses ne doivent pas être seulement culturelles. Puisque la réponse qui nous a été adressée quand il y a eu concertation de l’épiscopat africain par rapport à la bénédiction des couples homosexuels, on nous a renvoyé la balle : « Ce n’est pas de votre culture ».
Que peut-on recommander à la communauté en ces circonstances ?
En ces circonstances, il faut silence et prières pour confier au Seigneur son serviteur. Puisqu’il est désormais devant le juste juge, Père de miséricorde. Nous sommes d’ailleurs dans la semaine de la neuvaine pour la divine miséricorde. Il nous a même offert un jubilé de la miséricorde en 2015. Il y a une parole de lui qui revient toutes les fois depuis le soir du 13 mars 2013 à la place Saint Pierre quand il est apparu : « Priez pour moi ». C’est fondamental. C’est ce qui peut l’accompagner.
Votre mot de la fin
Je vois qu’il y a une certaine densité en l’homme. On gagnerait à lire ses discours, à les lire en profondeur et non pas nous attarder simplement aux petites paroles. Je vois un homme libre et libéré. Une autre chose qui m’a fasciné chez lui et qui, pour moi est l’expression de son détachement, c’est qu’il n’est jamais retourné en Argentine depuis 2013.
Par Fidégnon HOUEDOHOUN