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Lutte contre le mariage précoce à Donwari Peul: Les filles peuvent rêver grand 

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(Les actions d’un Comité de veille villageois proactif)

Les mariages précoces continuent d’être endémiques au Bénin, surtout dans le septentrion. De nombreuses filles de moins de 18 ans sont données en mariage, ce qui entraîne la baisse du taux de scolarisation dans cette région. Mais certaines localités telles que Donwari Peul., avec l’appui de l’Unicef Bénin, du gouvernement et des Ong sur financement du Royaume des Pays-Bas et du gouvernement du Canada, mènent des actions fortes pour lutter contre le phénomène. Enquête !

Patrice SOKEGBE

Donwari Peul, presqu’une exception dans un environnement où la tendance est plutôt à l’illégalité. Dans cette localité de la commune de Kandi dans le département de l’Alibori, les jeunes filles de moins de 18 ans n’ont pas droit au mariage. Elles sont désormais à l’abri des mariages précoces grâce à un comité de veille. D’ailleurs, des événements qui se sont produits dans ce village laissent entrevoir une prise de conscience. L’air décontracté et serein, Gorobélou Abou, père d’un jeune homme, la quarantaine révolue, confie avoir ainsi œuvré à l’annulation d’un mariage précoce : « Les membres du comité villageois de lutte contre le mariage des enfants ont été informés que mon fils allait épouser une fille mineure. Ils ont alors activé leur stratégie de vérification. Ils m’ont rencontré et ont également rendu visite aux parents de la fille pour leur expliquer les conséquences néfastes du mariage précoce et les risques juridiques encourus…Ensuite, je me suis rendu chez l’imam avec les actes de naissance de la fille et de mon fils ». Selon Abou, l’Imam lui a ainsi confirmé que ce mariage était illégal et ne devait pas être célébré. C’est alors qu’il a informé les parents de la fille que le mariage était annulé. Bien que cela ait causé de la colère chez eux et chez les jeunes concernés, ils ont finalement compris que nul n’est au-dessus de la loi. La fille est encore là, et elle pourra se marier une fois qu’elle aura atteint ses 18 ans. Dans ce processus, Gorobélou Abou a déjà engagé des dépenses importantes pour ce mariage qu’il voulait grandiose. Les mets préparés pour l’occasion ont été partagés avec les membres de la communauté pour éviter le gaspillage. A l’image de Gorobélou Abou, les habitants se sont ligués contre cette pratique depuis plusieurs années, ce qui confère à Donwari Peul, la Certification de village exempt de mariage d’enfants.

En effet, selon l’Unicef Bénin, environ 26 % des femmes âgées de 20 à 24 ans ont été mariées avant l’âge de 18 ans et les filles vivant dans le Borgou, la Donga et l’Alibori sont plus exposés aux risques d’être mariées avant leur majorité. Et cette pratique assez récurrente, en plus d’être une violation des droits fondamentaux des enfants, entraine des conséquences graves, telles que la déscolarisation, les grossesses à risque, la mortalité maternelle, juvénile et infantile, la maltraitance, les infections sexuellement transmissibles y compris le Vih/Sida.

Un Comité de veille villageois en mode prévention !

Mais, Donwari Peul fait partie des nombreux villages de la commune de Kandi où le programme Cash Plus Care est, selon Caleb Ichola, Coordonnateur du Projet Cash Plus Care piloté par l’Ong Dedras, mis en œuvre grâce au partenariat entre l’Unicef Bénin et le gouvernement du Bénin, sur financement du Royaume des Pays-Bas et du gouvernement du Canada. Ceci, pour soutenir les communautés dans le cadre de la lutte contre le mariage des enfants. Pour relever ce défi, un Comité de veille villageois constitué de 7 membres avec le Délégué du village comme Président du Comité de veille, a été mis en place. « Je suis chargé d’enregistrer tous ceux-là qui viennent ou qui veulent marier leurs enfants ou faire marier leurs enfants. Mon rôle premier, c’est de contrôler ceux-là qui ont l’âge à savoir 18 ans avant le mariage, et donner le feu vert. Je suis aussi chargé d’enregistrer les mariages. A ceux qui prétendent marier leurs enfants avant l’âge requis, je leur montre les dangers qu’ils encourent en posant cet acte », a dit Imam Yacoubou Issiaka. Issa Bello, Représentant des jeunes, lui, facilite le dialogue Parents-enfants en vue d’une bonne orientation « Nous luttons aussi contre les violences faites aux filles et aux femmes. En un mot, tous ceux qui ne sont pas capables de se défendre », confie-t-il. A tout ceci, s’ajoutent des séances de sensibilisation sur l’hygiène menstruel au sein de cette communauté. « Nous sommes chargés de sensibiliser les jeunes filles dans le village surtout concernant leur hygiène menstuelle. Aujourd’hui, c’est un problème pour certains parents d’approcher leurs enfants et leur dire quoi faire quand elles sont en menstrue. Donc, en tant que membre CVV, nous conseillons les parents à beaucoup communiquer avec leurs enfants », déclare Sanni.

En clair, pour Amadou Sabia, Délégué de Donwari Peul, ce programme vient apporter la lumière à sa communauté et il s’en réjouit. « Nous vivions dans le noir. Mais aujourd’hui, les gens ont compris les dangers qu’ils encourent en faisant les mariages précoces. Nous sensibilisons tout le monde dans le village. A présent, les populations sont mieux informées parce qu’elles comprennent les dangers que ces filles encourent lorsqu’elles se marieront avant l’âge de 18 ans. Nous conseillons aux parents de permettre à ce que les enfants, surtout les filles, aillent à l’école. Car, jusqu’ici, dans notre village, nous n’en avons pas», a-t-il souligné.

Une série d’actions conjointes qui paient!

Il est à souligner que Donwari Peul fait partie d’un village modèle où il y a un fort engagement de la communauté, une bonne dynamique pour la lutte contre le mariage précoce. Pour Brice Kakpo, Chargé de protection de l’enfant à l’Unicef, bureau de zone de Parakou, le programme Cash Plus Care consiste en des transferts monétaires pour soutenir le maintien des filles à l’école et tout ce qui concerne l’éducation des filles, des enfants en général et prend en compte, le bien-être des enfants. « Ce volet fait qu’à travers un partenariat avec Dedras ONG dans la commune de Kandi, nous accompagnons les communautés dans la lutte contre les violences basées sur le genre et notamment le mariage des enfants…», déclare-t-il, tout en précisant que les Cvv sont souvent composés de leaders d’opinion et de femmes, de jeunes afin que la lutte soit commune et mieux aider à déjouer les cas de mariage d’enfants. « Au terme de ce processus, on a noté que sur les 46 villages qui ont été évalués sur le dernier volet, 44 ont été certifiés avec zéro mariage d’enfants. Cela vient conforter les efforts de tout le monde. Mais la lutte continue parce qu’on va faire en sorte qu’il n’y ait plus du tout de cas de mariage d’enfants, qu’il n’y ait plus de violences faites aux enfants au niveau des communautés, que les enfants, les filles puissent vraiment aller à l’école et contribuer véritablement au développement du Bénin », ajoute-t-il. En définitive, Donwari Peul s’est distingué par son engagement contre le mariage précoce, même si la scolarisation des enfants reste un défi.

Cet article a été réalisé dans le cadre de l’initiative «Mission Presse en Urgence» de l’Unicef-Bénin

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