Face au refus de certains établissements scolaires et centres de formation d’accepter le Certificat d’Identification Personnelle (CIP) sans signature, notamment pour les mineurs dans le cadre de la constitution des dossiers pour les examens de fin d’année, le Ministre de l’Intérieur tape du poing sur la table : les responsables des établissements doivent désormais vérifier l’authenticité des documents grâce à l’application « anip.bj », uniquement accessible sur Android.
À la mairie d’Abomey-Calavi, ce jeudi 19 décembre 2024, une double file de personnes s’étend devant l’Unité Communale d’Identification des Personnes (UCIP), installée dans la cour de la municipalité. Certains sont venus pour leur premier enrôlement, d’autres pour une mise à jour de leurs informations dans la base de données de l’ANIP. Un parent, présent dans la file, raconte avoir validé la veille le dossier de sa fille pour le baccalauréat grâce à l’application : « C’est très pratique. Je n’ai même pas eu à me déplacer. Face aux rumeurs persistantes, je suis allé moi-même dans son établissement. Le surveillant général a vérifié son identité via le QR code sur la carte et m’a confirmé que tout était en ordre. Il a accepté son dossier au même titre que celui de ses camarades. »
Au Collège d’Enseignement Général 2 d’Abomey-Calavi, Assouma Amidath, élève en terminale D3, témoigne également : « Mon père craignait que l’établissement refuse mon CIP. Il m’a envoyée à la mairie pour vérifier. Là-bas, on m’a orientée vers l’ANIP. À ma grande surprise, la directrice m’a dit qu’il n’y avait plus besoin de signature. Elle a fait les vérifications sur son téléphone. C’était un grand soulagement. J’étais stressée à l’idée de manquer les cours pour remplir des formalités. »
Lancée le 25 octobre 2023 par l’Agence Nationale pour l’Identification des Personnes (ANIP), l’application mobile anip.bj vise à simplifier l’acquisition des documents administratifs, à vérifier leur authenticité et mieux à gérer les anomalies dans les données d’identité ainsi que les plaintes et réclamations. Grâce à cette solution, de nombreux apprenants ont pu déposer leurs dossiers en toute transparence et sans discrimination.
L’application permet non seulement de confirmer l’identité d’un usager, mais aussi de lutter efficacement contre les faux documents administratifs. Divers services, tels que la protection sociale, la santé, l’éducation ou encore les opérateurs téléphoniques, peuvent désormais authentifier une personne sur la plateforme. Bellor Ganhounouto, ingénieur en sécurité des réseaux et systèmes d’information, consultant délégué à la protection des données personnelles explique : « Si, par exemple, le certificat d’identification personnelle d’un candidat est endommagé au point de rendre illisible sa date de validité, on peut scanner le QR code avec l’application pour vérifier son authenticité. Le statut passe au vert pour un document authentique en affichant le Numéro d’identification personnelle (NPI) et la photo de la personne, et au rouge dans le cas contraire. En cas de problème, l’application signale le champ erroné à corriger. »
Un outil pour l’accès équitable à l’éducation
En plus de vérifier l’authenticité des documents, l’application facilite la délivrance des pièces administratives telle que le certificat d’identification personnelle. Ce document a été érigé par les autorités pédagogiques parmi les pièces maîtresses pour constituer les dossiers d’examens de fin d’année et accéder aux salles de composition. Désormais, les apprenants peuvent se contenter de cette carte, moins coûteuse que la carte nationale d’identité ou le passeport.
« Avant, la carte nationale d’identité coûtait 2 500 FCFA. Aujourd’hui, il faut débourser entre 8 000 et 10 000 FCFA pour la version biométrique. Pour les parents à revenus modestes, la carte CIP, accessible en ligne pour seulement 1 000 FCFA, est une véritable bouée de sauvetage », analyse Robertine Médéssè Saho, directrice du Collège d’Enseignement Général Les Pylônes, à Agla, dans le 13ᵉ arrondissement de Cotonou.
Du côté de la Fédération Nationale des Associations de Parents d’Élèves et d’Étudiants du Bénin (FENAPEB), le président Épiphane Azon confirme : « Les candidats aux examens obtiennent plus facilement leur carte CIP dans le délai imparti, contrairement à la carte nationale biométrique, dont la procédure est plus longue. »
Le certificat d’identification personnelle repose sur le Numéro d’Identification Personnelle (NPI) attribué à chaque citoyen. Ce numéro unique, introduit par le décret n°2020-099 du 26 février 2020, est devenu indispensable pour accéder aux services publics. Il permet d’identifier chaque individu de manière fiable et de regrouper l’ensemble de ses données administratives.
Une transformation administrative en cours
L’article 5 du décret n°2020-099 du 26 février 2020 stipule que le NPI est obligatoire pour accéder aux services publics. Il vise à simplifier l’échange de données entre les structures publiques et parapubliques. Quant à l’article 6, il précise que l’ANIP est chargée de définir les formats du certificat d’identification personnelle et de mettre en place des services d’appui pour sa distribution dans une approche dématérialisée.
Pour de nombreux acteurs de l’éducation et de l’administration, l’application « anip.bj » marque une avancée significative vers la modernisation des services publics. Cependant, certaines limites subsistent, notamment la disponibilité de l’application uniquement sur Android, ce qui exclut les utilisateurs d’iOS et ceux ne disposant pas de smartphones.
En attendant une version améliorée et accessible à un plus large public, l’application joue déjà un rôle crucial dans l’accès équitable à l’éducation et à d’autres services sociaux au Bénin.
Bergedor HADJIHOU
Cet article a été rédigé dans le cadre de la Bourse de journalisme sur les IPN organisée par la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest et Co-Develop.