En quelques mois, le gouvernement béninois est passé de 21 à 19 membres, à la faveur de deux remaniements techniques. Une réduction d’effectif qui, loin d’être anodine, relance le débat sur le nombre idéal d’un exécutif efficace. Entre cumul de portefeuilles et recentrage des missions, Patrice Talon semble amorcer une rationalisation silencieuse, inspirée de pratiques en vigueur dans d’autres démocraties.

Arsène AZIZAHO
Le départ de Paulin Akponna du gouvernement ce jeudi 26 juin 2025 marque bien plus qu’un simple changement de tête. Il traduit une dynamique plus profonde, celle d’un resserrement progressif de l’équipe gouvernementale. Depuis le décès du ministre Yves Kouaro Chabi en février dernier et son remplacement en interne par Véronique Tognifodé, déjà ministre des Affaires sociales, le gouvernement est passé de 21 à 19 membres. Un choix qui n’a rien d’anecdotique dans un contexte où le train de vie de l’État n’a rien à voir avec la réalité socio-économique d’une majeure partie de la population. En confiant désormais plusieurs portefeuilles à un même ministre, comme c’est le cas avec José Tonato, désormais en charge à la fois du Cadre de vie, des Transports, de l’Énergie, de l’Eau et du Développement durable, Patrice Talon donne le ton. Ce n’est pas le nombre de ministres qui garantit forcément l’efficacité gouvernementale.
Et si on essayait un modèle français ?
Dans le système français, les grands ministères structurants (Économie, Intérieur, Affaires étrangères, etc.) s’appuient sur des secrétaires d’État thématiques, chargés de dossiers précis sans occuper la pleine tête d’un département ministériel. Dans ce modèle, la hiérarchisation des responsabilités favorise à la fois la clarté des missions et la cohérence des politiques publiques, tout en réduisant les coûts de fonctionnement de l’exécutif. Au Bénin, cette piste n’est pas encore explorée. Pourtant, les récents ajustements du gouvernement Talon lui donnent un avant-goût. Le ministère de l’Économie s’est vu attribuer la coopération auparavant rattachée aux Affaires étrangères ; le portefeuille des Transports a été fusionné avec celui du Cadre de vie ; celui de l’Eau a été réintégré à l’Énergie. Des regroupements logiques, qui traduisent un souci de synergie, de lisibilité et même d’économie, en espérant que les ministres concernés ne cumulent pas les salaires. En effet, chaque ministère entraîne des charges importantes : directions administratives, cabinets, missions, véhicules, primes etc. Et dans un pays comme le nôtre, où les ressources publiques restent limitées, toute économie réalisée au sommet de l’État peut être redéployée dans les secteurs prioritaires comme l’éducation, la santé ou l’agriculture. De facto, il ne s’agit pas seulement de faire moins, mais de faire mieux avec moins. Un pari risqué, certes mais qui, bien planifié, peut aussi offrir un modèle plus agile de gouvernance.
Quoi qu’il en soit, cette nouvelle configuration ministérielle pourrait bien être un ballon d’essai, à un an des élections générales de 2026. En assumant des choix de rationalisation, Patrice Talon dessine peut-être les contours d’un futur exécutif plus resserré, mais plus fonctionnel. Il revient maintenant à l’administration et aux titulaires de portefeuilles multiples de démontrer que l’efficacité ne dépend pas du nombre, mais de la vision, du leadership et de l’organisation. Ceci pourrait davantage conforter le prochain Président du Bénin dans cette position. Rendez-vous donc en 2026. Peut-être qu’il y aurait même un autre remaniement avant, qui sait…