Lancé en 2020 avec le soutien de la Banque mondiale, le projet ARCH (Assurance pour le renforcement du capital humain) vise à garantir une couverture médicale universelle aux plus démunis.

Le projet ARCH s’inscrit dans la vision du Programme d’Actions du Gouvernement (PAG 2021-2026) qui fait de la couverture sanitaire universelle une priorité nationale. Son objectif, améliorer l’accès équitable aux services de santé de qualité pour les populations les plus vulnérables, particulièrement les ménages vivant dans l’extrême pauvreté. De façon spécifique, ce projet ambitieux vise à améliorer la qualité des services de santé dans 500 formations sanitaires publiques (modernisation des infrastructures, équipement médical et formation du personnel soignant), à étendre l’Assurance maladie universelle (AMU) à 1,8 million de personnes supplémentaires, des indigents en l’occurrence, et à améliorer la gouvernance sanitaire à travers notamment la digitalisation des processus.
Le projet ARCH cible prioritairement les ménages les plus pauvres, selon la méthodologie du registre social unifié développé par l’Agence nationale de protection sociale (ANPS). Selon les données publiées par cette Agence en 2023, quelque 850 000 ménages en situation d’extrême pauvreté sont pris en compte, soit environ 4,2 millions d’individus. Ces personnes ont un revenu journalier inférieur à 1,90 dollar américain, selon les standards de la Banque mondiale. Une attention particulière est accordée aux femmes enceintes et allaitantes, aux enfants de moins de cinq ans, aux personnes âgées de plus de 60 ans et aux personnes vivant avec un handicap.
Prise en charge intégrale des soins de santé primaires
Le projet ARCH couvre l’intégralité des soins de santé primaires, incluant les consultations médicales, les examens de laboratoire de base, les médicaments essentiels génériques, et les soins préventifs. Le paquet intègre aussi les soins obstétricaux et néonatals, ainsi que les consultations prénatales, les soins postnataux et la prise en charge des nouveau-nés. Cette couverture vise à réduire de 40 % la mortalité maternelle et infantile, précise-t-on. Le projet prend également en charge les interventions nutritionnelles spécifiques, notamment la supplémentation en micronutriments pour les femmes enceintes et les enfants, ainsi que les cas de malnutrition aigüe. Pour éviter la fraude, chaque bénéficiaire reçoit une carte d’assurance biométrique, délivrée par l’Agence nationale d’identification des personnes (ANIP), en collaboration avec l’Agence nationale de l’assurance maladie (ANAM).
Selon le rapport d’étape publié par l’Unité de gestion du projet (UGP-ARCH) en 2024, 1,6 million de personnes ont été enregistrées dans le système ARCH depuis le lancement officiel en janvier 2021, ce qui représente 64 % de l’objectif quinquennal fixé à 2,5 millions de bénéficiaires. Le document note une couverture de 78 % dans le Nord (Alibori, Borgou, Atacora) contre 52 % dans le Sud. La mise en œuvre de ce projet a entrainé une augmentation de 73 % de la fréquentation des services de santé dans les zones couvertes, révèle une étude de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), réalisée en 2024 en partenariat avec l’Université d’Abomey-Calavi. L’étude sur les dépenses de santé des ménages conduite par l’INSTAD la même année indique une réduction de 67 % des dépenses directes de santé chez les bénéficiaires du projet ARCH. Cette diminution représente en moyenne 45 000 FCFA d’économies annuelles par ménage bénéficiaire.
8 millions de bénéficiaires d’ici 2030
Malgré ces avancées notables, des défis majeurs demeurent. L’évaluation à mi-parcours réalisée par le Cabinet d’Études SYNERGIE en 2024 révèle des disparités significatives dans la mise en œuvre du projet. Les zones rurales éloignées, particulièrement dans les départements de l’Atacora et de la Donga, accusent un retard dans l’enregistrement des bénéficiaires en raison des difficultés d’accès et de communication. Aussi, des problèmes de connectivité internet et des résistances culturelles constituent des freins à la mise en œuvre efficiente du projet qui devrait couvrir l’ensemble du territoire national d’ici 2030, l’objectif étant d’atteindre une couverture de 8 millions de bénéficiaires, soit 65 % de la population béninoise.
Au demeurant, le projet ARCH ne représente pas seulement une bouffée d’oxygène pour les soins de santé des pauvres extrêmes ; il constitue un modèle de transformation systémique capable d’inspirer l’ensemble du continent africain.
P. A