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Porteurs d’aide à Dantokpa : l’avenir des enfants entre le marteau et l’enclume

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Au cœur du marché Dantokpa, plusieurs enfants travaillent chaque jour comme des porteurs d’aide, transportant des courses pour survivre. Cette activité loin d’être celle de l’avenir a attiré notre regard et a alimenté notre curiosité. Nous sommes allés à la rencontre de ces enfants.   

 Samedi 07h! Le plus grand centre d’affaires du Bénin, le marché Dantokpa se remplit tout doucement. Les vendeuses s’installent en attendant les potentiels acheteurs. Dispersés dans les coins du marché, ces enfants alertent les acheteurs à travers ce slogan, “mèbotor dié” qui signifie porteur d’aide en langue locale” Fongbe”. Ils ne manquent pas d’aller vers les acheteurs pour leur proposer leur service en échange de quelques pièces de monnaie. Approché, Jean Affognon, un jeune garçon de 10ans nous a permis de suivre son quotidien dans ce marché pendant quelques heures.

Après l’alerte des clients avec le slogan, il sillonne le marché avec les clients qui vont vers des étalages pour leur présenter ses services. Certains acheteurs déclinent l’offre, mais après quelques tentatives vaines, Jean parvient à convaincre un client de le laisser porter ses courses. Une fois près de la voiture de ce dernier, il le rémunère pour le service rendu. C’est un travail qui s’est imposé comme une alternative à la pauvreté. « J’ai perdu ma mère très tôt. Ne pouvant plus continuer les études, mon père me dépose tous les matins avant de continuer en ville. Il est zémidjan. Je passe mes journées à faire les achats et à transporter les marchandises », a confié le jeune Jean. La chasse aux clients ne porte pas toujours ses fruits. « Certains jours, les gens veulent de vos services et d’autres pas ». Certains clients en effet ont peur de ces enfants qui proposent leurs services pour diverses raisons.

C’est le cas de Maman Laguide (nom d’emprunt) une habituée du marché qui prétend ne pas avoir confiance en ces mèbotor. « J’ai vu un usager du marché qui s’est fait voler ses courses après avoir demandé l’aide de ces mèboto. Depuis ce jour je ne leur demande plus d’aide ». A l’inverse d’autres clients comme Séraphine estime important d’encourager ces enfants en leur confiant leurs courses. Elle soutient que « ces jeunes ont besoin d’aide et que c’est un moyen de leur donner du courage ».
Christiano Minho lui, est élève en classe de sixième. Contrairement à Jean, Christiano passe uniquement ses weekends dans le marché à la recherche de clients pour participer également aux charges familiales. « Mes parents ne sont pas si riches », explique-t-il.

La réponse sociologique au phénomène
Le travail des enfants est sous tendu par plusieurs raisons. François Kintossou GOÏ évoque en premier lieu « la pauvreté familiale » qui pousse ces enfants à travailler pour participer aux charges financières familiales ou pour s’assurer d’avoir le minimum nécessaire à leur survie. L’accès limité à l’éducation est également un facteur clé dans le travail de ces enfants. « En effet vous savez que dans certaines régions au Bénin la situation géographique d’une école ou bien encore le coût élevé des frais d’écolage peuvent constituer des obstacles qui amènent les enfants à travailler pour contribuer aux charges familiales afin de s’assurer une éducation », affirme-t-il. Il met également l’accent sur un autre facteur souvent pas évoqué. Il s’agit des normes culturelles et sociales. Selon lui , »dans certaines communautés au Bénin il est permis que les enfants participent aux activités économiques dès leur jeune âge. Ce qui explique donc leur présence dans le marché ». Ces enfants sont donc dès le bas âge associé à des activités qui normalement ne sont pas de leur ressort. Et cela n’est pas sans conséquence sur les enfants ni sur la société en elle-même.
Il faut reconnaître que le travail des enfants selon notre sociologue “compromet non seulement leur éducation mais aussi l’avenir de la société ”. Il mentionne le faible développement des capacités physiques, psychologiques et intellectuelles qui reste une entrave pour la société en ce sens où ces enfants ne développent pas les facultés intellectuelles nécessaires pour diriger une société. François Kintossou GOÏ à ce propos pense que l’absence d’une main d’œuvre de qualité “ralentit la croissance économique, ce qui limite le développement et freine la croissance et l’innovation ”. Ces enfants sont également victimes de « marginalisation » et ont des chances « minimes de réussite sociale ».

L’aide sociale aux familles en difficulté comme solution

François Kintossou GOÏ préconise la vulgarisation d’aide sociale pour les familles en difficulté. Et même si certaines populations ont déjà bénéficié du projet Assurance pour le Renforcement du Capital Humain (ARCH) lancé depuis quelques mois par le gouvernement béninois, il est important de travailler encore plus pour permettre aux couches les plus vulnérables d’avoir accès à ce programme. L’objectif dudit projet étant d’accroître la capacité des citoyens à accéder aux services sociaux de base tout en créant des opportunités économiques durables et équitables.

Loin d’être solution toute trouvée, ce phénomène mérite l’attention des pouvoirs publics et des parents pour éviter que ces enfants se retrouvent détournés de leur avenir et éternellement enfoncés entre le marteau et l’enclume

Ultancia HODONOU(Coll)    

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