Une récente évaluation menée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) révèle que 15 des 61 stocks de poissons analysés dans les eaux côtières de l’Afrique de l’Ouest et centrale sont dans un état de surexploitation. Les scientifiques appellent à des actions concertées et à la réduction des efforts de pêche.
Fulbert ADJIMEHOSSOU (Coll)
« L’effort de pêche doit être réduit pour les stocks surexploités. » C’est un avertissement du Groupe de travail sur l’évaluation des ressources démersales, qui s’est réuni début septembre 2024 à Kribi, au Cameroun. « Les niveaux actuels de pression de pêche pour ces stocks sont insoutenables », précise Prof. Zacharie Sohou, président de ce groupe établi par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture et le Comité des pêches pour l’Atlantique Centre-Est.
Les eaux concernées s’étendent de la frontière sud du Sénégal à celle de l’Angola, incluant les îles de Cabo Verde et São Tomé-et-Príncipe. Ces zones abritent des espèces essentielles comme les capitaines (Brachydeuterus auritus) et les dentés (Dentex spp.), dont les populations subissent une pression de pêche excessive. L’évaluation a porté sur six groupes distincts de poissons démersaux, crevettes et céphalopodes.
15 stocks surexploités
Au total, 61 stocks ont été analysés, représentant des populations de poissons d’une espèce donnée vivant dans une zone géographique définie. Selon les résultats, 15 stocks nécessitent une réduction immédiate de la pression de pêche. « Les stocks surexploités affectent directement les économies locales et les moyens de subsistance des populations côtières », souligne le Directeur de l’Institut de Recherches Halieutiques et Océanologiques du Bénin (IRHOB).
Pour inverser cette tendance, les décideurs doivent adopter des plans d’aménagement des pêches avec des quotas adaptés à l’état des stocks. En revanche, six stocks sont pleinement exploités, avec des niveaux de pêche actuels considérés comme durables. 13 stocks sont non pleinement exploités, ce qui offre des marges pour une exploitation modérée dans un cadre strictement contrôlé. « Pour ces stocks, les niveaux de pêche actuels peuvent être maintenus et suivis de près », rassure le chercheur.
Diminuer les efforts de pêches
La capture totale des ressources démersales en 2023, analysée par le Groupe de Travail en 2024, était d’environ 198 003 tonnes. Les espèces incluses dans le groupe 2, pêchées en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Togo et au Bénin, ont connu une tendance relativement stable, avec une quantité estimée à 38 442 tonnes.
« En 2023, ces espèces représentaient 19 % des captures totales d’espèces démersales dans la région sud du Comité des pêches pour l’Atlantique Centre-Est (COPACE), soit une légère augmentation (1 %) par rapport à 2022 (37 859 tonnes)», indique le rapport. Les efforts de pêche peuvent être maintenus pour le Pageot rose (Pagellus bellottii) et les espèces de Maigres (Pseudotolithus spp.).
Par contre, les scientifiques recommandent de réduire de 10 % les captures du capitaine (Brachydeuterus auritus) dans ces pays, pour ne pas dépasser 16 459 tonnes en 2024. Il faudra aussi diminuer de 20 % les captures du denté (Dentex spp.), afin de ne pas dépasser 4 000 tonnes.
Renforcer la collecte des données de pêche
« Une meilleure gestion des ressources passe par un investissement dans des systèmes de collecte de données robustes pour combler les lacunes actuelles. La plupart des stocks étant partagés par au moins deux pays, il est impératif de renforcer la coopération régionale en matière de recherche et de gestion », déclare le Professeur Sohou.
La pêche illicite est une préoccupation majeure dans le golfe de Guinée. De plus en plus de voix, parmi les organisations non gouvernementales et les scientifiques, plaident en faveur du renforcement des contrôles pour assurer le respect des quotas de pêche. Prof. Sohou tient à remercier la Préfecture Maritime et la Marine Nationale à Cotonou qui déploient depuis quelques années des moyens pour la surveillance des eaux béninoises afin de limiter la pêche INN au Bénin.