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Plantes inférieures du Bénin : au plus près des bryophytes et de leur potentiel

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À travers le monde, des chercheurs mènent une chasse discrète mais passionnée aux bryophytes, ces plantes inférieures encore peu connues mais au potentiel immense. Leur mission : dénicher des molécules d’intérêt, comprendre leur écologie unique et percer leur secret de résilience. Dans les forêts du Bénin, nous en avons rencontré, en quête de réponses sur ces espèces longtemps négligées.

Fulbert ADJIMEHOSSOU

Les bryophytes ? Ces petites plantes discrètes tapissent les sous-bois, s’accrochent aux troncs moussus et colonisent les milieux humides. Les communautés rurales, notamment celles vivant aux abords des forêts en croisent souvent, mais ne connaissent que peu de leurs secrets. Alors, pour lever le voile sur ces végétaux méconnus, nous décidons d’aller en expédition, au cœur de la dense et brumeuse forêt de Lama, à Zogbodomey. Sac au dos, bonnet vissé sur la tête et bottes enfoncées dans le sol détrempé, nous avançons aux côtés de Gafarou Agoundé, agronome forestier, et Ghyslain Chabi Kpétikou, botaniste. Tous deux doctorants à l’Université d’Abomey-Calavi, ils scrutent attentivement l’environnement, à la recherche de ces végétaux énigmatiques. « Ces plantes inférieures forment le deuxième grand embranchement du règne végétal après les angiospermes, avec environ 20 000 espèces, explique Ghyslain Chabi.

La flore du Bénin compte 2 807 espèces. Cependant, l’inventaire qui a permis d’arriver à ce décompte il y a quelques décennies n’avait pas pris en compte les plantes inférieures. Le pays ne dispose toujours pas de base de données dédiée aux bryophytes. Gafarou Agoundé pense que c’est le moment ou jamais de suivre de près cette flore sensible au changement climatique. « Ce sont des espèces qui dépendent de l’humidité. Plus la température augmente, plus les milieux deviennent secs, ce qui affecte les espèces de petite taille, comme les bryophytes. Après l’identification, nous allons modéliser la distribution spatiale de ces espèces dans les conditions climatiques à l’horizon 30, 50 ans, ou même à la fin du siècle, pour déterminer quelles zones seront favorables à chaque espèce de bryophyte et d’évaluer leur statut de conservation », explique Gafarou.

Ces deux doctorants ont été sélectionnés dans le cadre du projet BryoBen, une initiative de recherche et de formation destinée à fournir au Bénin les outils nécessaires pour l’identification, la taxonomie, la collecte de données et l’évaluation de la conservation des bryophytes. Les données (photos et relevés d’occurrence des espèces) collectées seront mises à disposition sur des plateformes telles que GBIF et iNaturalist. Ce voyage commence par la collecte de ces espèces minuscules, vertes et sans fleurs, qui se fixent sur les arbres ou les rochers. « Il nous faut d’abord nous rendre sur le terrain, collecter les échantillons et les identifier. C’est ce que nous faisons depuis plusieurs semaines », Ghyslain Chabi Kpétikou, rencontré fin novembre 2024.

La quête des bryophytes

L’aventure a commencé deux mois plus tôt pour ces passionnés de bryophytes. Ils ont exploré la forêt classée de l’Ouémé Supérieur à N’Dali, la forêt classée de l’Alibori-Supérieur, traversé des réseaux de cours d’eau, exploré les affleurements rocheux de Natitingou et effectué des collectes dans les forêts des Monts Kouffé, à Agoua, Savalou, Dassa, Pobè et Sakété. Cette expédition leur a permis de découvrir les trois principales classes de bryophytes : les mousses, les hépatiques et les anthocéros. « À Pobè, par exemple, nous avons trouvé une grande diversité. C’est pareil à Sakété », indique Gafarou. Avant eux, deux équipes de chercheurs s’étaient déjà rendues dans les forêts du Bénin pour identifier les zones à fort potentiel.

Rencontre avec Dr Jéronime Marie-Ange Ouachinou, botaniste spécialisée en ethnobotanique, ethnopharmacologie et conservation des plantes, sur les rives de la rivière Banou, dans la forêt classée du Mont Kouffé, à Bantè. Elle se réjouit que le Bénin puisse bientôt en apprendre davantage sur ces plantes et leurs usages. « Vous pouvez voir ces plantes recouvrir des branches d’acacia, comme le long de cette rivière. Ce sera fascinant de mener ces recherches jusqu’au bout. Des études menées à l’échelle mondiale visent à identifier des molécules d’intérêt pour l’industrie cosmétique et pharmaceutique. Les bryophytes sont également importants pour le développement des sols, le cycle biogéochimique des nutriments, la rétention d’eau, la colonisation des plantes, la germination des graines, la croissance des semis et la régénération des forêts. Elles peuvent servir d’indicateurs pour détecter les changements dans les communautés végétales », explique-t-elle.

Suspense!

Cependant, il faudra encore patienter un peu avant d’obtenir des données précises sur ces plantes inférieures au Bénin. Les échantillons collectés sont soigneusement conservés à l’herbier national du Bénin, à l’Université d’Abomey-Calavi. Le Dr Gbèwonmèdéa Hospice Dassou, directeur du Jardin botanique et zoologique « Édouard Adjanohoun » de l’Université d’Abomey-Calavi et coordonnateur de BryoBen, invite à la patience. « La recherche sur les bryophytes au Bénin progresse lentement mais sûrement. Comme nous ne disposons pas de bryologues dans la sous-région, nous bénéficions du soutien d’un groupe d’experts bryologues de l’Université de Cape Town en Afrique du Sud et du Centre de conservation Kew Madagascar, par l’intermédiaire de la JRS Biodiversity Foundation », indique-t-il.

Au cours des prochaines semaines, Gafarou Agoundé et Ghyslain Chabi Kpétikou seront formés en Afrique du Sud pour approfondir leurs connaissances sur l’identification des espèces de bryophyte. A leur retour au Bénin, l’un d’eux se concentrera sur les usages ethnobotaniques des bryophytes par les communautés locales et l’impact du changement climatique sur ces plantes… Le second se concentrera sur la taxonomie : Tout pour faire connaître et explorer le potentiel des bryophytes au Bénin.

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