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L’audace d’une réforme périlleuse

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Ça maugrée dans les rangs de la chefferie traditionnelle. Et pour cause ! La loi sur le statut juridique de la chefferie traditionnelle au Bénin a été votée à l’assemblée nationale et attend sur la table de travail du président de la république, d’être promulguée. Au terme de cette loi, seize royaumes seulement bénéficient de la reconnaissance officielle, contre quatre-vingt et une chefferies traditionnelles supérieures et une dizaine de chefferies coutumières. Au-delà, ce sont des chefferies communautaires, qui ne bénéficient pas de la reconnaissance officielle qui fait droit à des avantages ainsi qu’à des privilèges. Le problème, c’est que des organisations sociales qui ont pris l’allure de royaumes ont été délaissées, parce qu’elles ne remplissent pas les critères de base, au regard notamment de l’état des lieux en 1894, années de référence retenue par les experts pour la reconnaissance des royaumes de la partie méridionale, et 1897 pour les royaumes de la partie septentrionale. De fait, c’est le prestige personnel, le poids financier et l’influence politique des rois qui, aujourd’hui, confèrent leur importance à de nombreux royaumes plutôt que l’historicité.

Activisme politique

Les gouverneurs, puis les différents pouvoirs républicains post-indépendance, ont disposé de nos chefferies traditionnelles à leur guise, de façon à asseoir l’influence sur leur soumission, leur vassalisation et leur soutien au pouvoir politique. Des rois ont été fabriqués pour les besoins de la cause, des chefs religieux se sont considérés comme des rois, à l’image de certains chefs de cantons, et, jusqu’en 1972, la carte de l’organisation sociétale a été redessinée par l’administration coloniale et post-coloniale. Sous la révolution, la chefferie traditionnelle a été assimilée à la féodalité et mise en veilleuse. Puis, sous le renouveau démocratique, la prolifération des chefferies traditionnelles à suivi le rythme exponentiel de la création des partis politiques et les intrigues ont tôt fait de créer des rivalités tenaces dans la succession au trône. L’activisme politique s’est exacerbé, sur fond de clientélisme, pour assurer l’épanouissement personnel des rois. Des associations sont nées des luttes permanentes d’hégémonie et le bicéphalisme a même pu être noté dans certains royaumes trop impactés par les courants politiques. La cartographie de nos chefferies traditionnelles était illisible et sa modification était enregistrée tous les matins, au gré des humeurs, de la corruption et des appuis politiques. Une réforme s’imposait, autant qu’elle était apparue nécessaire dans le système partisan.

Échec et mat !

 La méthodologie utilisée est le meilleur gage de l’impartialité. Une commission d’experts aux compétences multidisciplinaires et appartenant à toutes les aires géographiques du pays, des spécialistes et des personnes ressources de grande probité, choisis parmi la crème de nos sachants, ONT, pendant plus de deux ans, épluché les documents de l’administration coloniale, replongé dans les publications d’illustres chercheurs, et recueilli sur le terrain,  des informations sourcées. Le travail de ces commissaires ne souffre d’aucun déficit de bonne foi et ne saurait donner lieu à des soupçons de manipulation. Puisqu’au terme de la loi, c’est “Échec et mat” pour plusieurs membres de la commission eux-mêmes, qui ont vu leur royaume d’origine relégués. Il y a du mécontentement dans le grand royaume des oncles maternels du Chef de l’État, et le Président de l’Assemblée nationale a échoué à faire reconnaître le roi de sa localité d’origine. Preuve s’il en fallait, de la rigueur et de l’impartialité de la commission et des députés, même si une amélioration reste possible. À un an des élections générales, il faut reconnaître et saluer d’une part, le mérite de l’initiative, la pertinence de la réforme, l’audace de l’entreprise, et, d’autre part, le sens de la responsabilité et l’esprit républicain de tous les acteurs de cette réforme, CQFD.

Anicet OKE

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