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Sociologue Didas TOSSOU au sujet du féminisme au Bénin : « Certaines femmes considèrent que la reconnaissance des droits féminins passe nécessairement par la dévalorisation de l’homme »

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Au Bénin, la notion de féminisme gagne en visibilité et séduit un nombre croissant de femmes qui s’en revendiquent. Mais dans ce combat pour l’égalité des sexes, certaines dérives apparaissent : la défense des droits féminins s’accompagne parfois d’une dévalorisation systématique des hommes. Le sociologue Didas Tossou décrypte les origines et les conséquences de ce glissement.

FRATERNITE:  En tant que sociologue, comment définissez-vous le féminisme dans le contexte béninois ?

Le féminisme est un mouvement intellectuel, social et politique qui milite pour l’égalité des droits entre les hommes et les femmes dans tous les domaines de la vie : politique, économique, social, culturel et juridique. Dans le contexte béninois, cette lutte pour l’égalité est souvent interprétée de manière radicale par certaines personnes, qui la réduisent à une stricte parité : « ce que l’homme a, la femme doit aussi l’avoir». Cela mène parfois à une vision conflictuelle où le féminisme est perçu comme une rivalité entre les sexes, plutôt que comme une quête d’équité fondée sur les compétences, les mérites et les droits fondamentaux.

Pourquoi observe-t-on, chez certaines femmes, une tendance à décrédibiliser ou insulter les hommes au nom du féminisme ?

Cette attitude s’explique souvent par une volonté excessive d’affirmer l’égalité, voire la supériorité des femmes, dans une société historiquement patriarcale. Certaines femmes considèrent que la reconnaissance des droits féminins passe nécessairement par la dévalorisation de l’homme. Cela provient en grande partie d’un complexe d’infériorité transformé en rejet de l’autre. Elles ne voient plus en l’homme un partenaire ou un complément, mais un adversaire. Cette posture mène à des généralisations injustes et à un rejet parfois agressif de la masculinité.

Quelle est la différence entre un féminisme revendicatif légitime et la misandrie (haine des hommes)?

Le féminisme revendicatif légitime repose sur des fondements juridiques et sociaux clairs. Il cherche à garantir l’égalité des sexes telle que définie par la Constitution et les Objectifs de Développement Durable, par exemple. Il revendique les droits de la femme de manière constructive et dans le respect des valeurs républicaines.

La misandrie, en revanche, est une forme de haine dirigée contre les hommes. Elle naît du refus de reconnaître les efforts ou les mérites de l’homme, et aboutit à des discours ou comportements violents, discriminants ou méprisants à son encontre. La misandrie nie la complémentarité entre les sexes et pousse à des revendications déconnectées des réalités sociales et humaines.

Ces comportements radicaux nuisent-ils à la cause féministe ? Si oui, de quelle manière ?

Oui, ces comportements nuisent considérablement à la cause féministe. En imposant des quotas sans tenir compte des compétences, on risque de promouvoir des femmes mal préparées ou non qualifiées à des postes de responsabilité. Cela engendre une perception négative du féminisme, assimilé à de la médiocrité imposée.

Quand certaines femmes sont nommées uniquement parce qu’elles sont femmes, sans être réellement prêtes à assumer les responsabilités, cela discrédite les avancées du mouvement. Résultat : le féminisme perd en crédibilité et en efficacité, car il ne produit pas les résultats attendus dans la gouvernance ou les actions sociales.

Comment les hommes peuvent-ils s’impliquer dans le combat pour l’égalité sans se sentir accusés ou exclus ?

Les hommes ont un rôle fondamental à jouer. Ils doivent accompagner, former, soutenir et orienter les femmes, surtout dans les sphères où ils ont déjà acquis une certaine expérience.

Il ne s’agit pas d’imposer ou de diriger, mais de partager les connaissances, de favoriser le mentorat et de sensibiliser sur les mécanismes de réussite. Il est important que les hommes comprennent que l’égalité ne signifie pas leur exclusion, mais plutôt une redistribution plus équitable des rôles et des opportunités.

Quelles solutions éducatives ou sociales pour éviter ces dérives tout en poursuivant le combat pour les droits des femmes ?

La clé, c’est l’éducation. Il faut former les jeunes filles dès le bas âge à avoir confiance en elles, à développer des compétences concrètes, à comprendre le leadership non comme une domination, mais comme la capacité d’agir et d’influencer positivement.

Il faut aussi renforcer l’empowerment des femmes, c’est-à-dire leur donner les outils nécessaires pour affronter les défis, prendre des décisions et occuper des postes de responsabilité avec efficacité. L’égalité ne se décrète pas, elle se construit à travers un travail éducatif, culturel et institutionnel de long terme.

Propos receuillis par Meuris Véran DANSOU (Stag)

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