La cérémonie de dédicace du livre « Vers le miracle béninois », écrit par l’ancien président de la République du Bénin, Nicéphore Soglo, a eu lieu hier à l’hôtel Golden Tulip de Cotonou. À travers son livre, le premier président de l’ère démocratique au Bénin partage son expérience et sa contribution à l’essor démocratique et économique du Bénin. L’événement a réuni de nombreuses personnalités politiques, dont l’ancien président Boni Yayi, des anciens présidents d’institutions, des intellectuels et des citoyens engagés.
Ange M’poli M’TOAMA
Un ouvrage comme un héritage. L’ancien président de la République et père du Bénin moderne l’a fait à la nouvelle génération et celle à venir. Nicéphore Dieudonné Soglo puisque c’est de lui qu’il s’agit a, dans son ouvrage « Vers le miracle béninois » paru aux Editons Harmattan, exposé sa passion et sa vision pour le miracle béninois. Car, le chef-d’œuvre constitue un précieux recueil où tous les Béninois devraient puiser des pensées de celui qui a été surnommé ‘‘Hercule’’ pendant son seul et unique mandat à la Marina. Pour le Père Arnaud-Éric Aguénounon, présentateur de l’ouvrage, il s’agit d’un « lègue » et d’un « trésor » pour le Bénin, une véritable « mine » d’enseignements. Si dans son ouvrage, l’ancien président de la République s’est focalisé sur l’histoire récente du Bénin, en particulier le rôle de la Conférence nationale des Forces Vives de la Nation, pour le père, « Vers le miracle béninois » n’est pas seulement un récit historique, mais un guide pour l’avenir du Bénin.
En effet, il insiste sur le fait que les écrits du patriarche proposent une réflexion profonde sur les fondements de la démocratie et de la gouvernance, et offrent une vision éclairée de l’avenir du Bénin. En présentant l’œuvre du Président Nicéphore Soglo, le Père Arnaud-Éric Aguenounon a également évoqué un modèle de gouvernance qui allie démocratie, développement et respect des droits humains. Il rappelle que même si la Conférence a permis au pays de se libérer d’un régime autoritaire, l’avènement du président Soglo a été un déclic à la démocratie. C’est d’ailleurs, ce modèle qui est au cœur de la réflexion de l’auteur.
Un bréviaire de la marche démocratique
L’ouvrage, selon le père Arnaud-Éric Aguénounon, poursuit la marche démocratique amorcée sous son règne et pose les bases juridiques, institutionnelles, structurelles et économiques du processus démocratique. Ainsi, il interpelle la conscience de la nouvelle génération de dirigeants à s’en servir comme d’un « phare » pour la réconciliation du Bénin avec son histoire, mais aussi pour la construction d’un avenir politique et économique stable.
Et pour cause, le livre revient sur les réformes politiques et économiques entreprises sous son mandat (1991-1996), notamment la gestion de la crise économique et le redressement du pays, qui a permis de passer d’une croissance négative de -3 % en 1989 à plus de 6 % en 1991. Le présentateur note toujours que le livre est un « appel à la vigilance et à l’engagement » face aux défis contemporains et un modèle pour la « pérennisation dans l’action publique de l’union nuptiale entre la démocratie et le développement ». En ce sens, il y voit comme une invitation à « réconcilier le Bénin politique d’aujourd’hui avec la démocratie » en s’inspirant des principes fondamentaux qui ont guidé la Conférence nationale de 1990.
La dimension culturelle de l’ouvrage
‘‘Vers le miracle béninois’’ ne se limite pas à une analyse politique, mais inclut aussi une forte composante culturelle. L’auteur met en lumière des symboles majeurs du patrimoine béninois, comme la Route de l’Esclave et le Musée des Arbres, qui illustrent la richesse culturelle et historique du pays. Ces éléments servent de point d’ancrage pour une réflexion sur la diversité et la résilience du peuple béninois. Cet héritage, Ganiou Soglo, organisateur de la cérémonie l’a également souligné. Cependant, il est revenu sur un parcours exceptionnel de son père Nicéphore Soglo ancré dans l’histoire, la culture et l’engagement pour un Bénin meilleur. Agrégé d’histoire, diplômé de l’ENA et ancien cadre à la Banque Mondiale, Nicéphore Soglo a su allier connaissances historiques et expertise économique pour transformer le Bénin. Son étude des injustices, telles que le massacre des Indiens et l’esclavage, l’a poussé à œuvrer pour la rédemption de son peuple, notamment après la Conférence nationale des Forces Vives de la Nation. Cet événement historique marque le début d’une nouvelle ère pour le pays, une ère de démocratisation où le président Nicéphore Soglo a joué un rôle déterminant pour sortir le Bénin d’une crise économique et politique majeure. A ce sujet, l’ancien président Soglo a insisté sur la nécessité de revenir sur l’histoire pour mieux comprendre les défis actuels du Bénin, en particulier ceux liés à l’héritage colonial et à la violence systématique qu’ont subie les peuples africains. Son discours a mis l’accent sur la violence de l’histoire coloniale et sur l’importance de préserver la mémoire collective.
Hommage à l’épouse de l’auteur, Rosine Vieyra Soglo
Un moment émouvant de la cérémonie a été l’hommage rendu à Rosine Vieyra Soglo, l’épouse de l’ancien président, décédée en 2021. Une minute de silence a été observée en sa mémoire, pour honorer son engagement en faveur des droits des femmes et des enfants, ainsi que ses actions philanthropiques. Son rôle dans le développement social du Bénin et son impact sur la vie politique et sociale du pays ont été soulignés avec émotion. La dédicace du livre ‘‘Vers le miracle béninois’’ a permis de récolter la somme de 520 000 FCFA lors d’une stratégie de vente à l’américaine.
Message de l’ancien président Nicéphore Soglo sur l’héritage colonial et la violence européenne
Mes chers amis, merci de votre présence. Je voudrais partager avec vous quelques réflexions sur un sujet qui me tient à cœur. Quand nous regardons les films contemporains, nous constatons que la violence est omniprésente, surtout dans les productions hollywoodiennes. Mais cette violence, comme l’a souligné Aimé Césaire, mon maître à penser, trouve ses racines dans l’Europe occidentale. Selon Césaire, l’Europe est responsable du « plus haut tas de cadavres de l’Histoire », et cela commence dès l’époque de Christophe Colomb.
Ce sont les Européens, notamment ceux de la péninsule ibérique, qui, dans leur quête de découverte, ont envoyé Colomb chercher une route vers le Japon, pour finalement découvrir l’Amérique. En arrivant, ils ont trouvé des peuples indigènes, souvent désarmés, qu’ils ont immédiatement soumis, utilisant la violence pour s’imposer. Les atrocités commises à l’égard de ces peuples sont indescriptibles : des enfants étaient tués pour nourrir des chiens, et des femmes étaient violées et tuées sans pitié. Ces actions sont l’incarnation même de la barbarie, comme l’écrivait un témoin oculaire, un Dominicain qui était présent lors de ces événements.
L’Europe, forte de ses armes, a ainsi écrasé des populations sans défense, comme l’a souligné Alexis de Tocqueville dans son livre sur l’Amérique. Des peuples entiers, comme les Séminoles, les Cris et d’autres tribus, ont été exterminés. Cette conquête sanglante a permis aux colons européens de s’emparer de terres et de ressources, tout en effaçant les traces de ces peuples.
Et ce n’est pas tout. L’héritage colonial s’étend bien au-delà de l’Amérique. En Afrique, la traite des esclaves a été initiée sous l’impulsion de figures comme Louis XIV, qui, à travers l’esclavage, a contribué à la construction de monuments comme le château de Versailles. Ce château, magnifique en apparence, est imprégné du sang des Africains réduits en esclavage. De même, des symboles comme la tour Eiffel et l’Élysée ont été financés grâce à l’exploitation des Noirs. Combien de gens savent cela ? Combien de gens réalisent que ces monuments incarnent cette violence historique ?
