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Violences basées sur le genre : un fléau à multiple visages

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Le Bénin promeut l’égalité du genre et la protection des droits des femmes et des filles. Créé il y a quelques petites années, l’Institut National de la Femme (Inf) ne cesse d’œuvrer, pour éradiquer le fléau des Violences Basées sur le Genre (Vbg), afin de protéger et de redonner la dignité à la jeune fille et à la femme. Mais force est de constater que les droits de ces dernières ne sont pas toujours protégés, car elles continuent de subir diverses formes de violences.

Evelyne Ketoh (Coll)

Elle désigne tout acte préjudiciable perpétré contre la volonté d’une personne qui résulte d’un abus de pouvoir et qui est fondé sur l’inégalité entre les hommes et les femmes.  La Déclaration des Nations-Unies sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes (1993), explique la violence à l’égard des femmes comme :  » tout acte de violence dirigé contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles, psychologiques, y compris de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que subit toute femme dans la vie privée ou dans la vie publique.

Ainsi, les violences commises à l’égard des femmes sont très diversifiées et se présentent sous plusieurs forms comme la violence physique, la violence psychologique, la violence verbale, la violence sexuelle, la violence en ligne et la violence économique et financière.

En effet, la violence physique inclut une large gamme de sévices qui peuvent aller d’une simple bousculade à l’homicide : pincements, gifles, coups de poing, coups de pieds, l’enlèvement, la séquestration, le trafic des êtres humains, les morsures et les brûlures.

Quant à la violence psychologique, il s’agit d’une série d’attitudes et de propos qui visent à dénigrer et à nier la façon d’être d’une personne. Ces paroles ou ces gestes à l’égard de la jeune fille ou de la femme ont pour but de la déstabiliser ou de la blesser. Très souvent, les victimes disent que la terreur commence par un regard méprisant, une parole humiliante, une tonalité menaçante pour terminer par des agressions physiques.

Pour ce qui est de la violence psychologique, elle s’articule autour de plusieurs axes de comportements ou d’attitudes qui constituent des micro-violences difficiles à repérer.

Le contrôle

Le contrôle se situe d’abord dans le registre de la possession, c’est le fait de surveiller la femme de façon malveillante avec l’idée de la dominer et de la commander. On veut tout contrôler pour imposer la façon dont les choses doivent être faites, les dépenses, les relations sociales et même les pensées. Cela peut être le contrôle des heures de sommeil, des heures de repas, ou carrément d’empêcher la femme de progresser professionnellement ou de faire des études.

L’isolement

Pour que la violence puisse se perpétuer, le bourreau va isoler progressivement la femme de sa famille, de ses ami(e)s, l’empêcher de travailler, d’avoir une vie sociale.  En isolant sa femme, le conjoint fait en sorte que sa vie soit uniquement tournée vers lui. Il fait en sorte qu’elle ne soit pas trop indépendante pour ne pas lui échapper. Ceci peut se traduire aussi par le fait de lui imposer sa famille et son environnement social à lui. L’isolement progressif aboutit à un contrôle total de la personne.

La jalousie pathologique

Parfois, la jalousie pathologique de l’homme peut faire que la femme elle-même s’isole pour avoir la paix. Des cas de suspicion constante, l’attribution d’intention non fondée, qui se traduisent par la surveillance des coups de téléphone, de l’emploi du temps, des relations avec la famille et les amis… D’une façon générale, aucune explication rationnelle ne vient apaiser une jalousie pathologique, car il s’agit ni plus ni moins que d’un refus d’une réalité.

Le harcèlement

En répétant à maintes fois un message à quelqu’un, on parvient à saturer ses capacités critiques et son jugement et à lui faire accepter n’importe quoi. Ce sont par exemple, des discussions sans fin pour extorquer des aveux, jusqu’à ce que la personne, épuisée, finisse par céder.

Le dénigrement

Il s’agit avant tout d’atteindre l’estime de soi de la personne, lui montrer qu’elle ne vaut rien, qu’elle n’a aucune valeur. La violence s’exprime sous forme d’attitudes dédaigneuses et de paroles blessantes, de propos méprisants, de remarques déplaisantes. Ce peut être la dénigrer sur ce qu’elle fait, sur ce qu’elle est ou bien dénigrer ses capacité intellectuelles. D’après une étude québécoise, même si les femmes sont tout aussi capables de dénigrer leur conjoint, les attaques sont différentes selon les sexes. Les hommes attaquent plus leur femme dans leur rôle de mère, dans leurs capacités ménagères ou dans leurs qualités de séduction, ce qui correspond au stéréotype social de la femme.

Les humiliations

Humilier, rabaisser, ridiculiser est le propre de la violence psychologique. Cracher à la figure, faire des gestes obscènes, des grimaces quand la personne parle, proférer des insultes qui fait naître un sentiment de honte et vise l’estime de soi de la personne qui finira par intégrer la dépréciation et ne se sentira plus digne d’être aimée.

Les actes d’intimidation

Claquer les portes, briser des objets pour manifester sa mauvaise humeur constituent des actes d’intimidation. Quand une personne se défoule sur des objets, la partenaire peut l’interpréter comme une forme de violence maîtrisée. Il s’agit tout de même bien d’une violence indirecte. Le message à faire passer à l’autre est « regarde ce que je peux (te) faire! »

L’indifférence aux demandes affectives

La violence morale, c’est aussi le refus d’être concerné par l’autre. C’est se monter insensible et inattentif envers sa partenaire ou afficher du rejet ou du mépris. C’est ignorer ses besoins, ses sentiments, ou créer intentionnellement une situation de manque et de frustration pour maintenir l’autre en insécurité.

Les menaces

La violence psychologique peut comporter des menaces : on menace d’enlever les enfants, de priver d’argent, de frapper, de se suicider, si la femme n’agit pas dans le sens attendu. Tous ces agissements, pris séparément, pourraient s’inscrire dans le cadre d’une scène de ménage courante, mais se sont leur répétition et leur durée dans le temps, ainsi que l’asymétrie dans les échanges, qui constituent la violence. La violence psychologique constitue donc un processus visant à établir ou maintenir une domination sur la partenaire. La violence psychologique est déniée par l’agresseur, ainsi que par les témoins qui ne voient rien, ce qui fait douter la victime de son ressenti. Rien ne vient pour constituer la preuve de la réalité qu’elle subit. C’est une violence « propre ».

Ainsi, violence physique et violence psychologique sont très souvent liées. Il n’existe pas de violence physique sans qu’il y ait auparavant de violence psychologique.

Ensuite, la violence verbale est une atteinte personnelle comme les critiques en privé ou en public, la moquerie, les insultes particulièrement blessantes, les reproches. Un exemple partant, l’homme qui dit à sa femme : “Toi, tu es dans ce foyer , mais tu  ne vaux rien”.

La violence sexuelle, c’est la forme de violence dont les femmes ont le plus de mal à parler et pourtant, elle est très présente. La violence sexuelle comprend les attouchements, le harcèlement sexuel, l’outrage à la pudeur, les avances non désirées, l’exploitation sexuelle en passant par le viol conjugal. Cela peut obliger la femme à des activités sexuelles dangereuses ou dégradantes, mais le plus souvent, c’est pour contraindre la femme ou la jeune fille à une relation sexuelle non désirée, sous la menace. Dans une étude récente, portant sur 148 femmes victimes de violences dans leur couple, 68% des victimes interrogées rapportaient avoir subi, en plus des coups et blessures, des violences sexuelles conjugales. Ces femmes agressées sexuellement présentent plus de symptômes psychologiques que celles qui n’avaient subi que des violences physiques sans composante sexuelle.

 La violence en ligne, se fait par l’utilisation des plateformes en ligne (whatsApp, facebook,  messenger…) en vue d’intimider, de menacer, de réduire au silence ou de prendre pour cible des filles ou des femmes, ou de leur infliger des souffrances en leur envoyant des messages ou des images insultants sans en avoir l’autorisation.

En outre, la violence économique et financière s’exerce différemment selon les milieux socio- économiques et le niveau d’éducation. Dans ce cas de violence, il s’agit d’imposer des restrictions à la femme d’exercer une activité rémunératrice de revenus l’empêchant ainsi d’acquérir son indépendance économique et financière… Le cas le plus courant est la dépendance économique de la femme qui ne travaille pas et qui n’a pas de revenus propres. Pour s’assurer de garder le pouvoir financier, l’homme peut commencer par vérifier systématiquement les comptes de son épouse, se refuser de donner suffisamment d’argent afin de limiter les capacités de la femme à constituer son capital ou des économies. Cela peut aller jusqu’à la confiscation du salaire d’une femme qui travaille.

Dans les couples où la femme gagne autant ou plus que son homme, les problèmes sont d’un autre ordre. Celui-ci peut être amené à dévaloriser la position enviable de sa compagne, à la culpabiliser de vouloir faire carrière au détriment de sa vie familiale et à la pousser à renoncer ou à reléguer en seconde position sa vie professionnelle pour valoriser la sienne.

Cependant, il existe aussi d’autres formes de violences exercées sur les femmes et qui sont souvent moins prises en considération. Il s’agit notamment de la violence juridique, la traite des femmes ou le nouvel esclavage et l’utilisation de l’image de la femme à des fins commerciales.

La violence juridique

L’État peut perpétrer des violences à l’égard des femmes par la négociation de leurs droits et la promulgation de lois et de mesures qui limitent leurs rôles dans la famille et dans la société. C’est le cas par exemple de nombreuses législations dont les codes de la famille, actuellement en vigueur dans nombre de pays comme l’Afghanistan où les femmes sont privées de leur droit à l’éducation et ne peuvent pas exercer leur profession. Ces États ne reconnaissent pas la pleine citoyenneté des femmes et légalisent le contrôle exercé sur celles-ci par les hommes (la polygamie, le mariage forcé…).  

La traite des femmes constitue une forme de violence qui prend de l’ampleur et touche plusieurs pays notamment la Lybie et le Koweït.  De nombreuses sources indiquent que des centaines de milliers de femmes sont, chaque année, victimes de la traite au niveau mondial, mais peu de cas sont portés à l’attention des autorités. Selon le Protocole additionnel à la convention des Nations-Unies visant à prévenir et à punir la traite des personnes en particulier des femmes << la traite aux fins d’exploitation comprend au minimum, l’exploitation sexuelle, les services forcés , l’esclavage >>.

L’utilisation de l’image de la femme à des fins commerciales est une forme de violence extrêmement sournoise, car elle porte atteinte à la dignité de la femme. Elle se retrouve sous des formes diverses telles que, les journaux et revues spécialisées, les CD vidéos, les sites Internet qu’on pourrait qualifier d’objets de consommation individuelle et volontaire.

Mise à part toutes ces formes de violences énumérées supra, il y a également d’autres formes de violences basées sur le genre qui ne sont que des pratiques traditionnelles néfastes. On peut citer le mariage précoce et le lévirat.

Le mariage précoce ou mariage d’enfant désigne tout mariage officiel ou toute union officialisée entre une fille de moins de 18 ans et un adulte. Bien que l’âge de la majorité civile et l’âge pour contracter un mariage correspondent fréquemment à 18 ans, ils varient selon les pays. 

Cette pratique est très fréquente et courante dans plusieurs pays notamment les pays en voie de développement. Prenons le cas des États-Unis, où des exceptions légales autorisent le mariage des mineurs dans 46 Etats. 

En Afrique, plus précisément au Bénin, les cas de mariage précoce sont très récurrents sans le consentement de ces dernières.

Le lévirat est une coutume décrétant qu’une veuve, doit épouser le frère de son mari décédé. Autrement dit, le lévirat est un type de mariage particulier où le frère d’un défunt épouse sa veuve afin de poursuivre la lignée de sa famille.

Les enfants issus de ce remariage ont le même statut que les enfants du premier mari. Le frère peut être un frère biologique du défunt ou une personne socialement classée comme telle.

Les violences basées sur le genre dont font l’objet les femmes ne constituent pas un fait social nouveau. Mais elles nécessitent un ferme engagement politique et une prise de conscience des femmes pour mener le combat de leur éradication.

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