Consultante en Relations Internationales et Diplomatie Culturelle entre le Brésil et le Bénin, Tatiana Sagbohan est spécialiste en Économie Culturelle. Interprète Traductrice, elle est aussi Chercheuse scientifique à l’institut des études comparatives en administration des conflits de Rio de Janeiro.
Fredhy-Armel BOCOVO (Coll)
A MON PÈRE
Je suis restée quelques instants figée sur mon écran repensant à l’invitation pour cette lettre ouverte. Je repensais à ce jeune homme qui s’est présenté à moi, la grande passionnée des Relations internationales et de la Culture afro-latine. Je repensais à ces mots sur mon apport intellectuel dans le domaine de la diplomatie culturelle entre le Bénin et le Brésil. J’y repense et il me plaît d’adresser cette lettre aux hommes.
Oui, aux hommes. A ceux qu’on appelle affectueusement « Papa ».
Vous savez, j’ai 2 grandes passions dans la vie: d’une part, ma carrière professionnelle, puis d’autre part -et avant tout- ma famille représentée ici par mon PÈRE. Ooooh oui, mon PÈRE ! J’ai tellement d’admiration pour lui. C’est d’ailleurs lui qui m’a donné goût aux Relations internationales, lui-même étant diplomate.
Cher Papa,
Chaque fois que je dois répondre au pourquoi de mon choix professionnel et précisément sur la Diplomatie Culturelle, mes yeux scintillent car à coup sûr je te ferai un clin d’œil, à toi, mon père adoré. Tu es mon idole et c’est un privilège inestimable de tutoyer au jour le jour son idole, de pouvoir me référer à elle.
Papa, tu es un homme extraordinaire. Je suis si fière de te dire, de te rappeler à tout va que je t’aime, je t’admire. A chaque fois, je suis si heureuse de t’écouter me répondre “ Moi aussi ma belle, ma fille. Je prie tout le temps pour toi…”. Ces mots suffisent pour illuminer mes journées.
Papa, ta résilience, ton humilité, ta gentillesse, ton honnêteté dont je jouis des fruits ( quand on me demande “ Êtes-vous la fille de Mr SAGBOHAN?” ) est une source de motivation à toujours poser des actes honnêtes, en milieu professionnel comme social.
Ma plus grande peur dans ce monde est celle du jour où tu ne serais plus là. Même le simple fait de l’écrire me donne des frissons de tristesse dans le dos. Mais, comme toujours, je me console en disant maman et toi serez centenaires.
Ah papa !
Atlântico Negro, Bénin – Brésil, 1996, documentaire classique, regroupant des figures emblématiques de la littérature, de la sociologie, des historiens béninois et brésiliens opinant sur la diplomatie culturelle benino brésilienne, grand documentaire à succès au Brésil, diffusé sur les chaînes nationales brésiliennes. T’en souviens-tu ?
Rires! Quelle drôle de question de ma part!
Tu me parlais tellement de ce documentaire quand j’étais toute petite et je n’y prêtais pas trop attention. Tu faisais partie des personnes ressources en diplomatie culturelle dans ce documentaire. Te souviens-tu de la première fois que je l’ai découvert, que je l’ai regardé ?
Te voir apparaître à l’écran, tout jeune, le visage tout beau, fin et serein a décidé de mon chemin professionnel. Ce week-end de l’année 2015 à Bahia, Salvador, ce documentaire m’est apparu comme une prophétie.
Aurais-je pu imaginer que j’allais avoir ce déclic en répondant à l’invitation de ce professeur de philosophie africaine et artiste peintre ? Dès qu’il a su que j’étais une étrangère dans l’immeuble où j’habitais à l’époque, il n’a pas hésité à m’inviter à me joindre à lui pour suivre un documentaire classique sur la richesse culturelle existante entre le Brésil et l’Afrique. À aucun moment, il n’a précisé que c’est le Bénin, mais quelle connexion ! Tout me semblait familier même si j’ignorais le nom du pays.
J’ai ressenti des frissons, des palpitations au fur et à mesure que défilaient les images du documentaire. Quelle surprise quand je vis mon feu grand père ! Je ne l’ai vu qu’une fois dans ma vie et j’étais toute petite. Il était comme le décrivaient si souvent les autres: bien soigné avec sa paire de lunettes originale et sa chaîne en or autour du cou sur son « agbada » avec une coupe de cheveux crépus bien tracés et teintés. C’était un homme bien apprêté et soigné, “le toujours jeune”…mais je refusais encore de croire que c’était lui.
Ramenant en arrière la vidéo de 30 secondes pour bien revoir cette séquence, mes yeux se remplirent de larmes de fierté et de joie. Mes mains qui tremblaient, ma voix toute tremblante, j’appris au professeur que j’ai reconnu mon père, mon grand père etc. dans le documentaire. Nous fîmes une pause.
Ce jour fut et la jeune fille que j’étais fit le choix décisif d’une carrière professionnelle en Diplomatie Culturelle entre le Brésil et le Bénin.
Ma proximité et mes connaissances sur les communautés d’ afrodescendants, acteurs culturels brésiliens, du monde scientifique et académique du Brésil, qui ont de la connaissance sur la richesse culturelle qui lie le Bénin et le Brésil (dont nous- mêmes, Béninois ne sommes pas conscients) m’ont boosté.
Avec ce master en Économie Culturelle, je suis honorée de contribuer à la mise en place des stratégies pour renforcer les liens socio-économiques et culturels entre le Bénin et le Brésil à travers une exportation immatérielle de notre culture en général comme un réel soft power dans le monde.
MERCI PAPA d’exister, d’être ce pilier, ce modèle cette idole que j’ai le privilège de tutoyer au jour le jour.
MERCI à ces hommes qui savent reconnaître l’effort des femmes dans le domaine professionnel sans aucune complexité.
Soyez sûrs que je vous aime !
Oluwafemi Tatiana Marizella Gbossa Sagbohan
