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Sécurité routière au Bénin : environ 26 000 accidents en cinq ans, le code foulé aux pieds

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Entre 2018 et 2023, le Bénin a enregistré plus de 26 000 accidents de la route, causant près de 3 500 morts. Une moyenne de 700 vies perdues chaque année.

Patrice SOKEGBE

Les statistiques du Centre national de sécurité routière (Cnsr) sont sans appel. Chaque année, près de 5 200 accidents sont recensés, impliquant majoritairement des motos et des jeunes âgés de 20 à 40 ans. À cela s’ajoute un nombre élevé de blessés graves, gardant souvent des séquelles à vie. Le constat est encore plus amer lorsqu’on sait que les deux-roues sont impliqués dans 50 % des accidents, et que leurs usagers représentent plus de la moitié des cas de décès. Les routes nationales inter-États, notamment la RNI 1 et la RNI 2, concentrent à elles seules 52 % des accidents. Ces axes, vitaux pour l’économie et la mobilité, sont devenus de véritables couloirs de danger. À Cotonou, la capitale économique du pays, la densité du trafic combinée à une discipline routière relâchée, rend les accidents quotidiens, voire banals.

Les causes de cette hécatombe sont bien documentées. La conduite en état d’ivresse, la vitesse excessive, l’usage du téléphone au volant, le non-port du casque et de la ceinture de sécurité, la surcharge des véhicules et l’absence d’entretien technique en sont les principales. Les comportements à risque sont banalisés, et le non-respect du code de la route est trop souvent perçu comme une norme plutôt qu’une infraction. « Les gens roulent comme s’ils étaient seuls sur la route », déplore un officier de police en poste à Bohicon. « Ils dépassent sans signaler, grillent les feux rouges, et parfois même, refusent de s’arrêter à nos contrôles ».

Les zémidjan, très présents dans les villes béninoises, jouent un rôle crucial mais problématique. Souvent mal formés, circulant sans permis ou sans assurance, ces conducteurs de taxi-moto représentent à la fois un service essentiel et un facteur majeur d’insécurité.

L’État prend des mesures

Face à l’ampleur du phénomène, le gouvernement a mis en place plusieurs réformes structurantes. L’Agence Nationale des Transports Terrestres (ANaTT), en collaboration avec le CNSR, a introduit la plateforme numérique Sécuroute, qui permet de vérifier la régularité des documents des véhicules et de centraliser les informations liées aux contrôles routiers.

En parallèle, le Projet Asphaltage, lancé en 2019, poursuit la réhabilitation et la modernisation des voies urbaines dans plus de 40 communes. L’installation de lampadaires solaires, de feux tricolores fonctionnels et de pistes cyclables vise à sécuriser les déplacements, en particulier pour les usagers vulnérables comme les motocyclistes. En 2024, ces efforts ont commencé à porter leurs fruits. Selon les données du CNSR, le taux d’accidents a diminué de 10 % à l’échelle nationale. À Cotonou, la baisse atteint même 19 %, en partie grâce à la mise en place de voies réservées pour les motos.

Malgré ces avancées, les résultats restent fragiles. Les campagnes de sensibilisation peinent à toucher durablement les comportements des conducteurs. « Les messages passent, mais la pratique ne suit pas toujours », constate Mireille, une agente du CNSR à Abomey-Calavi. « Certains portent le casque uniquement quand ils voient un poste de police ».  De plus, la corruption au sein de certains corps de contrôle et l’impunité accordée à certains conducteurs ralentissent les progrès. Les sanctions, lorsqu’elles sont appliquées, sont parfois mal comprises ou contestées, renforçant un climat de méfiance entre usagers et Forces de l’ordre. Le CNSR recommande une réforme en profondeur de l’apprentissage de la conduite, ainsi qu’un renforcement de la sécurité dans les écoles de formation. À cela s’ajoute l’appel à une meilleure éducation civique, dès le plus jeune âge.

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