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Pénurie d’eau à Akpakpa, Agblangandan, Ekpè et environs : les robinets reprennent vie, la population soulagée

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D’Akpakpa à Ekpè en passant par Agblangandan, les populations vivent un calvaire depuis plus de deux ans. Dans ces localités, l’eau potable est devenue un luxe, voire une denrée rare, au point où il faut parfois parcourir des centaines de mètres pour s’en procurer. Mais aujourd’hui, les signes d’une amélioration réelle commencent à se manifester. Malgré les avancées, des inégalités subsistent, et les attentes restent fortes.

Arsène AZIZAHO & Samirath MOUMOUNI

Il est 5 h du matin ! Nous sommes à Akpakpa, précisément au quartier Agbato, dans le 3ᵉ arrondissement de Cotonou. Pierre Cakpo se lève, comme chaque jour depuis plus d’un an, pour une mission devenue presque rituelle : espérer voir de l’eau couler de son robinet. Mais depuis quelques jours, des ménages du même quartier ne se plaignent plus.  « Certains voisins commencent à avoir de l’eau toute la journée. Chez moi, ça dépend. On n’a pas de suppresseur, donc ce n’est pas régulier », confie-t-il. Apparemment, l’arrivée progressive et timide de l’eau fait sourire, mais le cœur n’est pas encore tout à fait tranquille. Par contre, à environ 3km, à Gankpodo dans le deuxième arrondissement, Enock Dakindji lui, n’a pas vu une goutte d’eau dans ses tuyaux depuis des mois. « C’est un calvaire que nous vivons à la maison depuis ce temps, puisqu’il faut aller chercher de l’eau ailleurs  », se désole-t-il. Un peu plus loin à  Agblangandan, dans la commune de Sèmè-Podji, le soulagement est palpable mais l’eau n’est pas encore complètement propre. « Ici, il fallait faire le plein d’eau avec plusieurs bidons de 25 L. Mais depuis ce week-end, l’eau coule normalement. Par contre, pour ce qui est de la propreté de l’eau, lorsqu’on place un filtre au niveau du robinet, il change totalement de couleur en un peu plus d’une journée », confie Bléck-Eric, un habitant du quartier. Un avis que partage également Anne Odegénidé, vendeuse d’eau à Sèkandji. « Depuis quatre jours, l’eau coule bien. Mais au début, c’était trouble. Ce n’est qu’hier que j’ai remarqué qu’elle était vraiment propre », raconte-t-elle. Toutefois, elle pointe du doigt un autre problème, celui du compteur, qui tourne anormalement plus vite que d’habitude. « Avant, ce n’était pas le cas. Le gouvernement doit demander à la SONEB de vérifier ça. On ne veut pas payer une fortune », alerte la vendeuse d’eau. Comme à Gankpodo, à Ekpè, Viviane Houndje reste, elle, toujours dans l’attente. « Rien n’a changé ici. L’eau des puits est parfois plus claire que celle du robinet », a-t-elle laissé entendre. Au même moment, à Agongo (Sèmè-Podji), Anne-Marie Adanlienclounon observe des progrès timides : « On n’a plus besoin d’aller aux puits, mais l’eau ne vient pas tous les jours ». Moumouni Karel, un autre habitant du quartier, salue les efforts mais profite pour demander plus : « Les panneaux solaires installés doivent aussi fonctionner. L’eau et l’énergie vont ensemble ».

Suppresseurs, filtres, désillusions : le calvaire

« Je devais marcher plusieurs kilomètres, parfois depuis la petite église protestante jusqu’au bord du pavé. Quand les tricycles passaient, l’unité du bidon était à 200 F. Ce n’était pas à la portée de tous  ». Un témoignage de Léonie Adambadji, habitante de Ekpè, qui illustre encore le quotidien épuisant. Benoît Saïzonou, chef du quartier Sèkandji Houéyogbé, se réjouit de l’amélioration de la situation mais il n’a pas oublié les années de privations. Il évoque un quotidien marqué par la soif, la patience, et parfois l’indignation. Il souligne que bien qu’il y ait eu l’apparition de l’eau dans certains foyers depuis une dizaine de jours, la situation reste encore précaire. Certaines zones ne sont toujours pas desservies, et l’eau qui coule n’est pas toujours propre. Il raconte que face à l’absence d’eau pendant plusieurs années, lui-même et d’autres habitants ont été contraints d’acheter des suppresseurs, parfois au prix de grands sacrifices financiers. Mais ces équipements n’ont pas toujours été efficaces : « À peine on a eu de l’eau pendant une semaine, deux semaines, le suppresseur était encore devenu notre point noir », confie-t-il. En dépit des dépenses engagées, certains n’ont plus jamais vu l’eau couler dans leurs robinets. Il se souvient de la fatigue physique, des longues files d’attente avec des bidons, et de la solidarité entre voisins pour s’approvisionner. Il alerte aussi sur la nécessité d’une pression suffisante dans les canalisations afin que l’eau soit accessible même sans suppresseur. « Tant qu’on aura besoin d’un suppresseur pour avoir l’eau, le problème n’est pas réglé », insiste-t-il. Il appelle donc les autorités à évaluer les besoins réels et à assurer un suivi technique rigoureux du projet pour combler les zones encore oubliées. A juste titre, Viviane Houndje et les siens attendent que la promesse du gouvernement se concrétise complètement…

Un chantier colossal, le gouvernement à pied d’oeuvre

Pour répondre totalement aux besoins en eau de ces populations, le gouvernement a lancé un vaste projet en juin 2024. D’un montant d’environ 17 milliards de FCFA, ce projet majeur permettra de conjuguer définitivement au passé les désagréments vécus actuellement dans les zones d’Akpakpa, d’Ekpè et Agblangandan. Les travaux consistent à la réalisation à Sèmè-Podji d’une usine de traitement d’eau d’une capacité de 1000m3/ heure ; de l’installation d’équipements hydraulique, électrique et électromécanique de 04 nouveaux forages ; de la construction d’un réservoir semi-enterré de 1000m3 ; de la construction d’un réservoir surélevé 100m3 ; d’une télégestion ; d’une canalisation de 35 KM PEHD PN10 de diamètre 280MM à 560MM et divers autres travaux. Le 23 janvier dernier, une délégation du ministère de l’Énergie, de l’Eau et des Mines a visité le chantier pour constater l’état d’avancement. À cette date, 55 % des travaux étaient réalisés, selon les experts. L’objectif affiché est clair : éradiquer définitivement les pénuries d’eau à Akpakpa, Agblangandan, Ekpè et environs d’ici juillet 2025, a promis le gouvernement. Et justement dès les premiers jours de ce mois de juillet 2025, les fruits tiennent déjà la promesse des fleurs, mais tant qu’il reste à faire, rien n’est encore fait, dit-on. Sur le terrain, les habitants attendent moins de discours. Ils veulent de l’eau en continue, plus de pression dans les tuyaux, moins de sable dans l’eau, et surtout moins de chiffres sur la facture. Certes, le liquide précieux commence enfin à couler, mais le pari du gouvernement ne sera gagné que lorsque tous les foyers, même les plus reculés de ces zones, ouvriront leurs robinets avec la certitude d’y trouver de l’eau claire, régulière… et à coût abordable.

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