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Lutte contre la pollution marine par les hydrocarbures: Les pêcheurs, des sentinelles d’alerte

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Plusieurs mois après l’échouement du navire UDEME à Fidjrossè, qui a failli provoquer une marée noire au large des côtes béninoises, les efforts de surveillance et de prévention se poursuivent en coulisses. Scientifiques, préfecture maritime et pêcheurs marins sont plus que jamais mobilisés.

Fulbert ADJIMEHOSSOU (Coll)

Depuis son centre de surveillance ultramoderne, la préfecture maritime du Bénin garde un œil sur chaque mouvement suspect en mer. Sur un écran géant, des agences intergouvernementales assurent une surveillance continue, bien au-delà des frontières nationales. Grâce à ce dispositif, l’échouement du remorqueur SDSL « UDEME » a été détecté et maîtrisé rapidement, évitant ainsi une pollution majeure.

« Ce système a déjà prouvé son efficacité. En effet, le 30 juin 2024, lors de l’échouement du remorqueur, la surveillance en place a permis d’anticiper les actions nécessaires pour éviter une pollution marine majeure. Cette intervention rapide a également aidé à prévenir un potentiel conflit diplomatique avec les pays voisins, en maîtrisant les risques environnementaux transfrontaliers », souligne le Préfet maritime, le Contre-amiral Fernand Maxime Ahoyo.

La pollution par les hydrocarbures est considérée comme l’introduction dans le milieu marin de substances pétrolières, sous forme de nappes flottantes, de rejets, de résidus ou d’émulsions. Elle peut être, selon le contre-amiral Ahoyo, accidentelle, lors de collisions, provoquées par des échouements ou avaries de navires pétroliers, des déversements illicites, fuites d’installations offshore, ou encore à de mauvaises pratiques dans les opérations de ravitaillement ou de nettoyage de cuves.

Fidjrossè a retrouvé sa quiétude avec la vidange de la cargaison du navire et de son démantèlement. Pour autant, le risque n’est pas écarté quand on sait que la menace peut provenir d’opérations de transbordement et d’avitaillement de navires en haute mer, de terminaux pétroliers offshore, des rejets d’eaux de ballast ou de fond de cale non traités ; ou parfois des activités de contrebande de carburant, qui peuvent entraîner des fuites ou des accidents en mer.

Impliquer davantage les pêcheurs

Pour le Professeur Zacharie Sohou, océanographe biologiste et directeur de l’Institut de Recherches Halieutiques et Océanologiques du Bénin (IRHOB), renforcer la prévention est une nécessité. « La menace est réelle. Sans la vigilance de la préfecture maritime, nous aurions connu une catastrophe. Par ailleurs, le trafic de produits pétroliers traverse nos eaux. Il est impératif de former et d’informer les pêcheurs sur les conduites à tenir en cas de pollution, à la détection d’une petite goutte de pétrole à la surface de l’eau lors de leurs activités en mer », insiste-t-il.

Les pêcheurs, présents en mer au quotidien, sont en première ligne face aux risques de pollution. Selon le préfet maritime, leur connaissance fine de l’environnement côtier et leur proximité avec les zones sensibles leur confèrent une position stratégique dans les dispositifs de surveillance environnementale. Pourtant, beaucoup ne sont pas encore pleinement conscients de leur rôle. « Il serait utile que nous sachions identifier les différents types d’hydrocarbures et comment réagir lorsque nous en trouvons des traces en mer », confie Franck Da Costa, président de la Fédération des pêcheurs marins artisans du Bénin.

Un atelier de formation a été organisé le 26 mars 2025 dans le cadre du programme GMES & Africa à travers le projet « Marine and Coastal Areas Management in North and West Africa (MarCNoWA) ». L’IRHOB en collaboration avec la Préfecture Maritime y ont sensibilisé les pêcheurs aux méthodes de détection des nappes d’hydrocarbures, aux risques sanitaires, aux premiers gestes d’alerte et aux protocoles d’intervention. « Nous voulons une implication réelle des pêcheurs dans la surveillance des ressources marines. Ils doivent savoir comment réagir lorsqu’ils observent une marée noire, et à qui signaler la situation immédiatement », a expliqué un responsable de l’IRHOB.

La préfecture maritime envisage également de mettre en place un réseau formalisé de pêcheurs sentinelles. Chaque zone côtière pourrait ainsi disposer de points focaux formés et équipés pour transmettre rapidement les alertes aux centres de coordination.

Les bons réflexes

En attendant la mise en place de ce réseau, tout acteur de la mer doit connaître les réflexes essentiels. « Lorsqu’on est témoin d’une pollution maritime, la première réaction est de donner l’alerte. Il faut contacter la préfecture maritime via le numéro vert suivant : 01 45 46 28 40. Ce service est actif 24h/24 et assure une permanence 7 jours sur 7 » rappelle le Contre-amiral Ahoyo.

Ensuite, il est crucial de fournir le maximum d’informations : la localisation exacte de la nappe ; l’aspect de la pollution : hydrocarbure lourd ou léger ? Se divise-t-elle en plusieurs nappes ? La texture : compacte ou en petits flocons ? Y a-t-il des reflets à la surface de l’eau ? Y a-t-il une odeur caractéristique, comme celle du gazole ou du pétrole ? Depuis combien de temps la pollution a-t-elle été observée ? Des navires sont-ils visibles à proximité ? Peut-on identifier un navire suspect ?

Toutes ces informations contribuent à une intervention rapide et efficace. Si un navire est suspecté, son sillage est observé, et des équipes de la marine nationale sont envoyées pour collecter des preuves.  Des photographies sont prises depuis des bateaux ou un hélicoptère. L’ensemble des données est ensuite transmis à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), qui engage les poursuites contre les responsables.

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