Un quart de siècle ! Dans la vie d’un organe de presse paraissant au quotidien, il n’y a peut-être pas de quoi pavoiser. Mais dans le contexte médiatique du Bénin post démocratique, il y a lieu de s’arrêter sur l’événement. C’est que les maladies infantiles sont si nombreuses, qui tuent les journaux, avant la poussée des dents. L’environnement est généralement peu incitatif. Parce que les lecteurs veulent lire les journaux sans les acheter. Les politiciens sont, tantôt partenaires et complices, tantôt manipulateurs malicieux ou adversaires résolus. Au pouvoir, ils ne veulent entendre qu’un seul son de cloche. Celui de leur chapelle. Leurs rivalités et leurs intrigues ont fini par créer une race particulière de journalistes. Celle des affairistes et des prestataires de services qui se déplacent avec, dans leur sac gonflés de paperasse, toute l’administration de l’organe.
Ne cherchez pas les employés du journal. Ils sont recrutés à la petite semaine et bénéficient pendant le laps de temps qu’on les utilise, d’un paiement salarial au lance pierre, largement en dessous du minimum décent, lorsqu’il existe. Ils vivent généralement d’expédients et furètent partout, comme des rats d’église, à la recherche du moindre per diem pour se sustenter. Dans ces conditions, les parutions sont exponentielles et finissent par coïncider avec des commandes particulières d’articles, des appels de pied ou des avant-papiers de chantage. Et bonjour les dégâts.
6260 parutions sans discontinuer
Voilà, sommairement décrit, l’environnement dans lequel le quotidien Fraternité qui est né le 1er décembre 1999, a réalisé, à ce jour, six mille deux cent soixante parutions quotidiennes, sans discontinuer, bien installé dans son siège physique connu de tous, en offrant un cadre de travail assez agréable à des journalistes qui se sont permis le luxe d’être des professionnels respectables, bien que n’ayant jamais étudié le journalisme d’école.
Parce qu’ils ont toujours eu un traitement salarial régulier et décent. Avec un niveau d’engagement parfois très osé sur des dossiers brûlants et des enquêtes dérangeantes, ils ont su contribuer efficacement à élever le niveau du débat public et à maintenir la veille citoyenne, tout en cultivant le sens de l’éthique et de la déontologie. C’est dire qu’avec des clients comme Fraternité, l’Odem et la justice se seraient ennuyés. Parce que, entre autres, la politique de formation continue adoptée par l’administration, sur financement autonome, a contribué à élever le niveau professionnel des journalistes. De sorte que le quotidien Fraternité s’est trouvé au cœur de l’information du Bénin et de sa démocratie, par les débats d’idées pour lesquels il offre, depuis sa création, l’une des meilleures tribunes, ainsi que par l’effort d’équilibre et de crédibilité de l’information livrée au public.
Reconnaissance aux pionniers
Telle est la prouesse qui a duré un quart de siècle et qui mérite que tous les acteurs des médias, du monde politique et de la société civile s’arrêtent, ne serait-ce qu’un instant, pour saluer cette belle réussite, réalisée presque contre le cours des évènements et dans des circonstances peu encourageantes. En l’occurrence, une pensée de reconnaissance s’impose, en hommage aux anciens animateurs du quotidien Fraternité, en particulier à Maître Brice Houssou, à Alexis Azonwakin, Basile Tchibozo, Léandre Adomou, Sabin Loumèdjinon, André Dossa…sans oublier les jeunes loups aux dents longues qui ont pris le relais : Moise Dossoumou, Angelo Dossoumou, Adrien Tchomakou…
Que dire après cela, à part mettre le chapeau bien bas pour l’homme d’affaires, au mécène visionnaire, qui a pensé à accompagner la création et le développement d’un organe de presse, en ces circonstances improbables, et en laissant aux journalistes, toute la latitude d’en disposer à des fins professionnelles. Honorable Issa Salifou, merci !
Enfin, comment finir sans saluer le leadership exceptionnel et unique dans tout le paysage médiatique, de l’un des plus grands patrons de l’histoire de la presse privée du Bénin ? Pour de très nombreux journalistes, dont beaucoup se sont reconvertis avec bonheur, il est l’instrument de Dieu, la main parfois invisible, qui aura aidé beaucoup de destins à s’accomplir.
Honorable Abdoul Malik Seïbou Gomina, trois fois Merci pour cet exploit ! Cette célébration est votre consécration. Cap sur les noces d’or.
Anicet OKE