À moins d’un an des élections générales de 2026, les quatre experts internationaux chargés d’auditer le fichier électoral du Bénin ont livré ce mardi 5 août 2025 à Cotonou les premières conclusions de leur mission. Sécurité juridique, inclusion, absence de doublons… mais aussi quelques pistes d’amélioration.
Au terme d’un mois de travail d’analyse du fichier électoral béninois, les experts internationaux mandatés dans le cadre de l’audit ont présenté ce mardi leurs premières observations. D’abord à huis clos, devant la CENA, l’ANIP, les ministères concernés et la Cour constitutionnelle. Puis en conférence de presse, aux côtés de Jean-Baptiste Elias, président du comité de pilotage.
Le chef de l’équipe, Ronsard Malouda Ngimbi, expert congolais, a salué « l’abondance de l’encadrement juridique » qui régit l’établissement du fichier électoral. Selon lui, le Bénin dispose d’un cadre législatif « suffisamment fourni », composé de lois et de décrets couvrant toutes les étapes du processus : de la collecte des données de l’état civil jusqu’à la confection des listes électorales informatisées.
Toutefois, les experts recommandent de compiler ces textes en un recueil unique, plus lisible, afin de faciliter leur diffusion auprès des acteurs et du public. Ils préconisent aussi une mise à jour de ces lois, notamment la suppression des références devenues obsolètes ou inadaptées au contexte institutionnel actuel.
Une proposition : revoir la date de référence pour les nouveaux électeurs
L’une des suggestions les plus marquantes concerne l’inclusion des jeunes citoyens dans les scrutins multiples de 2026. Actuellement, la loi prend comme date de référence celle du premier scrutin de l’année électorale pour déterminer l’éligibilité à voter.
Selon les experts, ce choix risque d’exclure les jeunes ayant atteint la majorité entre ce premier vote et les scrutins suivants. Ils proposent donc d’ajuster la date de référence à chaque jour de scrutin, ce qui permettrait une mise à jour dynamique de la liste électorale et une meilleure représentativité. « Il faudra que les législateurs retiennent comme date de référence les jours du scrutin concernés », a souligné Ronsard Malouda Ngimbi.
Pas de doublons détectés, grâce à l’ANIP
L’autre point positif, c’est l’absence de doublons dans les registres analysés. Une performance que les experts attribuent à la qualité du fichier d’état civil sur lequel repose le fichier électoral. « Le Bénin dispose d’un fichier modernisé et stabilisé. Chaque citoyen est lié à un identifiant unique, ce qui permet de sécuriser les extractions pour la liste électorale », explique le chef de mission.
Des mécanismes de vérification sont également en place pour s’assurer qu’aucun doublon ne persiste. « Ces mécanismes existent et sont efficaces », martèle-t-il.
L’indépendance de l’ANIP au cœur des préoccupations
Les experts se sont aussi penchés sur le statut de l’Agence nationale d’identification des personnes (ANIP), organe technique central dans la gestion du fichier électoral. Ils appellent à une vigilance particulière quant à son indépendance politique. « L’ANIP doit être protégée de toute influence, y compris de celle de la Présidence, malgré sa tutelle. Elle doit rester une structure strictement technique et professionnelle », a insisté le chef de mission.
Les experts suggèrent d’instaurer des mécanismes d’observation renforcés pour les activités électorales gérées par l’ANIP, incluant l’accompagnement par des acteurs politiques, civils et indépendants dans la constitution et l’affichage des listes.
Contexte de l’audit : une demande de l’opposition
Pour mémoire, l’audit du fichier électoral fait suite à une demande du parti d’opposition Les Démocrates, appuyée par d’autres formations politiques. Le président de la République, Patrice Talon, a donné son aval à l’exercice.
Quatre experts internationaux (spécialisés en démographie, biométrie, système informatique et législation électorale) ont été recrutés. Arrivés début juillet à Cotonou, ils ont passé un mois à analyser en profondeur les bases de données électorales, l’environnement juridique et les procédures techniques de l’ANIP et de la CENA.
Les résultats complets de l’audit devraient être rendus publics dans les semaines à venir, avant la tenue des élections générales prévues pour 2026.