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Comlan Kouassi, thérapeute de couple, sur les causes du chagrin d’amour : «La douleur amoureuse réveille souvent des blessures plus anciennes»

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Une rupture amoureuse n’est jamais facile, surtout quand on s’est beaucoup investi dans une relation. Ce moment difficile peut bouleverser non seulement le cœur, mais aussi la vie quotidienne. Plusieurs jeunes en souffrent sans savoir comment y faire face. Dans cet entretien, le psychologue clinicien Comlan Kouassi explique, avec des mots simples, pourquoi ça fait si mal, comment reconnaître ce qu’on ressent mais aussi comment se reconstruire peu à peu.     

Pourquoi une rupture amoureuse est-elle souvent aussi douloureuse, en particulier chez les jeunes ?

Une rupture amoureuse provoque un chagrin d’amour, une blessure affective très profonde. Elle entraîne une souffrance intense, souvent prolongée, car elle correspond à la perte d’une relation significative. La douleur vient aussi du fait que la personne s’était projetée dans l’avenir avec l’autre. Quand cette relation s’arrête brusquement, c’est un véritable choc émotionnel. C’est tout un espoir qui s’effondre, et cela peut même altérer l’estime de soi. La rupture amoureuse fait donc partie des causes immédiates du chagrin d’amour.

Vous distinguez les causes immédiates et les causes lointaines du chagrin d’amour. Pouvez-vous nous les expliquer ?

Bien sûr. Parmi les causes immédiates, il y a d’abord la rupture non désirée, la trahison, l’infidélité ou encore le mensonge, qui brisent la confiance et laissent des cicatrices profondes.

On peut aussi parler des attentes irréalistes que certains nourrissent sur l’amour ou le couple, ce qui crée des déceptions majeures. Il y a également l’incompatibilité d’humeur ou de vision de vie, qui finit par miner la relation. Quant aux causes lointaines, elles sont souvent liées à l’histoire de vie de la personne. Il peut s’agir de blessures d’enfance qui ont généré des scénarios de vie inconscients. Ces scénarios ‘’gagnants ou perdants ‘’ influencent notre manière d’entrer en relation. Par exemple, une personne persuadée inconsciemment qu’elle finira toujours seule va reproduire, sans le vouloir, des schémas d’abandon, de rejet ou de trahison.

Les injonctions parentales jouent-elles aussi un rôle dans ces schémas répétitifs ?

Absolument. Les injonctions parentales sont des messages négatifs que nous avons reçus dans l’enfance, souvent sans nous en rendre compte. Des phrases comme « ne sois pas toi-même », « ne sois pas important », « n’existe pas » peuvent conditionner notre manière d’aimer. Une personne qui croit qu’elle ne mérite pas l’amour va s’effacer dans la relation, se sacrifier, ou choisir des partenaires qui la dévalorisent. Cela mène souvent à une rupture douloureuse.

Après une séparation, y a-t-il des étapes psychologiques bien précises ?

Oui, une rupture est souvent vécue comme un deuil. Il y a des étapes émotionnelles, qui peuvent varier selon les individus. D’abord le déni, où la personne refuse de croire que c’est fini. Elle vit dans les souvenirs. Ensuite vient la colère : contre soi-même, l’autre, la vie, ou même Dieu.

Puis l’étape de la négociation : certaines personnes tentent de sauver la relation, physiquement ou mentalement, en s’imaginant des scénarios. Si cela échoue, la personne entre dans une tristesse profonde, parfois accompagnée de symptômes physiques : douleurs corporelles, fatigue, troubles du sommeil, voire de la respiration. Enfin, arrive l’acceptation : la personne reconnaît que c’est terminé et commence à avancer. Dans les meilleurs cas, cela mène à la reconstruction. Mais souvent, la reconstruction ne se fait pas. On reste bloqué dans des conclusions personnelles comme : « tous les hommes sont pareils », « aucune femme n’est fidèle », ce qui conditionne négativement les relations futures.

Peut-on vraiment se reconstruire après un chagrin d’amour, ou on apprend juste à vivre avec la douleur ?

Oui, on peut se reconstruire véritablement, à condition d’engager un travail sur soi. Cela peut se faire avec l’aide d’un thérapeute, mais aussi par une prise de conscience personnelle. Il faut accepter que nous sommes co-créateurs de nos expériences, bonnes ou mauvaises. Cette lucidité donne un nouveau souffle. Cela passe par un bilan personnel, une rétrospection de nos actes, une volonté de comprendre ce qui a mené à la rupture et de changer notre manière d’aborder les relations.

Quels signes indiquent qu’une personne va mal après une rupture ?

Il y a plusieurs signes d’alerte : isolement, perte d’intérêt pour les activités habituelles, trouble du sommeil, trouble alimentaire, agressivité, anxiété, voire dépression. Dans les cas extrêmes, on peut observer des troubles psychiatriques, des troubles obsessionnels, ou des somatisations sévères (douleurs au cœur, difficultés respiratoires, etc). Ces symptômes doivent être pris au sérieux.

Quelles erreurs les jeunes commettent-ils souvent après une rupture ?

Certains jeunes font des tentatives de suicide, estimant que leur monde s’effondre. D’autres se précipitent dans de nouvelles relations, non par amour, mais pour combler le vide affectif. Ces relations « pansements » aggravent souvent la douleur, car elles sont superficielles. Il faut au contraire prendre du recul, faire une pause, réfléchir, comprendre ses erreurs et reconstruire avec sérénité.

Existe-t-il des thérapies spécifiques pour surmonter le chagrin d’amour ?

Oui, plusieurs approches thérapeutiques peuvent aider selon la personne. On peut utiliser par exemple la thérapie cognitivo-comportementale, la thérapie narrative, ou encore l’EFT clinique (technique de libération émotionnelle). Mais au-delà des techniques, il est important de faire une pause, de se recentrer sur soi, de reconnaître ses besoins, de faire des activités qui apportent de la joie. L’objectif est d’accompagner la personne dans son état de stress post-traumatique lié à la rupture, et de l’aider à poser des actes plus sains à l’avenir, sans tomber dans l’auto-culpabilisation.

Quel rôle joue l’entourage dans la reconstruction ?

Un rôle central. Il faut entourer la personne d’affection, éviter de la laisser seule et créer autour d’elle un environnement chaleureux. L’isolement renforce les ruminations et les pensées négatives. L’essentiel n’est pas de lui dire « tu en trouveras un autre » ou « ce n’est pas grave », mais de lui offrir une présence sincère, de partager des moments joyeux et de lui rappeler qu’elle n’est pas seule. C’est ça, le vrai soutien.Propos recueillis par Samirath MOUMOUN

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