Le 15 juin dernier, lors du premier anniversaire du marché de Cadjèhoun, la directrice de l’Agence nationale de gestion des marchés (ANaGeM), Eunice Loisel épouse Kinnifo, a annoncé la fin de la gratuité des places dans les marchés urbains nouvellement construits. Mais à ce jour, rien n’a encore changé sur le terrain. Les commerçants affirment n’avoir jamais été informés officiellement. La nouvelle leur est parvenue par les médias et, parfois, même par leurs clients. Mais comment vendeurs et vendeuses accueillent-ils cette mesure ? Sont-ils prêts à débourser chaque jour 600 à 700 FCFA ? Une de nos équipes s’est rendue au marché de de Mènontin dans la matinée de ce mercredi 09 juillet.
« Nous ne vendons presque rien »
Dans les couloirs clairsemés du marché, l’ambiance est morose. Des commerçantes, assises, le regard perdu, d’autres, allongées près de leurs étals, patientent sans grand espoir. « Nous avons appris que nous devrions payer 600 FCFA chaque jour, mais jusqu’à présent, nous ne payons encore rien, car personne n’est venu nous le notifier officiellement », confient-elles. Avant même qu’elle ne soit interrogée, Ablawa, jeune vendeuse de condiments, visiblement révoltée exprime son incapacité à s’acquitter de cette nouvelle obligation : « Nous ne sommes pas en mesure de payer 600 FCFA par jour. Nous ne vendons presque rien, et la plupart du temps, nous passons nos journées à attendre désespérément des clients et à regarder passer le temps ». Plus loin, une vendeuse plus âgée, résignée, raconte, sur un air de nostalgie : « Avant, on prenait des tickets de 50 ou 100 FCFA, et déjà, certaines d’entre nous n’y arrivaient pas. Nos produits périssent, et malgré mon âge, je dois continuer à vendre pour ne pas dépendre totalement de mes enfants. Depuis ce matin, je n’ai encore rien vendu ».
Fermeture précoce et manque d’affluence
Au-delà du coût, d’autres dames pointent l’heure de fermeture du marché : « On ferme aujourd’hui vers 20h-20h30, alors qu’avant, on restait jusqu’au-delà de 22h. Beaucoup de clients venaient tard, ce qui augmentait nos ventes ». Bien qu’elles comprennent la volonté du gouvernement d’assurer l’entretien et le confort des lieux, elles plaident pour des ajustements. « Nous demandons que le montant soit revu à la baisse, autour de 100 à 300 FCFA maximum. Il faudrait aussi reconsidérer l’heure de fermeture et occuper les emplacements vides pour attirer plus de monde et stimuler l’activité », propose maman Antou. Sur une dizaine de commerçants interrogés, seuls deux reconnaissent vendre de façon acceptable. À défaut d’allègement, certains songent déjà à abandonner le marché moderne pour retourner dans la rue, malgré les risques, faute de rentabilité suffisante.
Alexia Lumière-Christina ADJOU-MOUMOUNI